Les expropriés du parc national

La direction du parc national de la Mauricie analysera cet automne les dossiers d’une vingtaine de propriétaires qui possédaient un chalet sur les rives du lac Wapizagonke.

Bien que l’on pense généralement que la totalité du parc à l’origine était constituée de terres publiques appartenant au gouvernement québécois, une infime partie estimée à environ 5% était située dans ce qu’on appelle un T.N.O., un territoire non-organisé.

Cette enclave se retrouvait dans le secteur sud du lac Wapizagonke, juste à côté de Saint-Mathieu. Les T.N.O. sont des terres généralement situées en forêt, qui ne sont pas pourvus de services et n’ont pas d’administration locale. On retrouvait donc à cette époque une vingtaine de chalets sur les rives du lac qui ont été inclus dans l’entente entre Québec et Ottawa sur le transfert des titres de propriété.

Parce que la création du parc national Forillon, en Gaspésie, aussi en 1970, avait donné lieu à des expropriations qui laissent encore un goût amer quarante ans plus tard, le gouvernement du Canada a décidé cet été d’accorder à ces propriétaires déchus des laissez-passer leur donnant droit à entrer gratuitement, leur vie durant, dans le parc qui a été érigé sur leur ancienne propriété. Le privilège sera aussi accordé à leurs enfants et petits-enfants.

Par souci d’équité, la mesure a été étendue à l’ensemble des parcs nationaux et lieux historiques canadiens. Au parc national de la Mauricie, on s’apprête donc cet automne à éplucher les archives afin d’analyser les documents relatifs à ces expropriations.

La mesure risque cependant d’avoir aucun impact chez nous parce que les laissez-passer ne seront accordés qu’aux gens dont la propriété expropriée constituait leur résidence principale. Ce qui a évidemment peu de chance d’être le cas des chalets du lac Wapizagonke.

De la vingtaine de bâtiments en question, un seul subsiste en 2010: la maison Vallerand. Une dénomination accordée parce que la propriétaire des lieux se nommait Claudine Vallerand, une animatrice d’émissions pour enfants diffusée à Radio-Canada dans les années 1960, mieux connue sous le surnom de Maman Fonfon.

Le bâtiment en bois ronds, toujours en bon état, sert aujourd’hui de gîte aux employés qui œuvre dans ce secteur du parc. Les autres chalets? Ils ont été majoritairement détruits bien que quelques propriétaires ont préféré les déménager.

Et quant aux membres des clubs de chasse et pêche – on en dénombrait seize avant la création du parc – qui ont régné sur les terres publiques durant la majeure partie du XXe siècle ici en Mauricie, inutile d’attendre.

Déjà privilégiés, leur descendance n’aura évidemment pas droit à ces passeports…