«Ce n’était pas bon pour moi» – Justin Bélanger

Par Philippe Boisvert Près de trois ans après avoir été le premier joueur testé positif dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec, Justin Bélanger a bien voulu revenir sur les événements qui ont mis fin à sa carrière de hockeyeur.

En fait, l’ancien représentant des Tigres de Victoriaville et des Saguenéens de Chicoutimi vit encore les conséquences reliées à son utilisation d’éphédrine pendant les séries éliminatoires 2004-05.

L’affaire avait fait tout un tollé dans les médias et dans le monde du hockey. Le 11 avril, à la fin d’une partie entre les Saguenéens et les Remparts au Colisée Pepsi de Québec, Bélanger et son coéquipier David Desharnais avaient été appelés à subir un test antidopage.

Desharnais n’a eu aucun problème, mais l’analyse de laboratoire a indiqué que le taux d’éphédrine, une substance interdite de la catégorie des stimulants, contenu dans l’urine de Bélanger dépassait la limite au-delà de laquelle le résultat est considéré positif.

L’éphédrine est un stimulant physique et psychologique qui fait partie des produits dopants interdits. Elle permet à l’athlète qui l’utilise d’avoir plus d’oxygène (de souffle) et donc d’énergie pour les muscles. Elle est prise en capsules et n’est pas en vente au Canada. «On arrivait d’une dure série contre le Drakkar de Baie-Comeau et j’étais blessé à l’épaule. Nous étions dans la chambre et un coéquipier m’a expliqué comment ça fonctionnait. J’en ai pris avant la partie, car je sentais que je n’aurais pas assez d’énergie pour accomplir mon rôle. Je devais jouer très physique à l’époque et je sentais que j’aurais besoin d’un boost pour me démarquer», se remémore Bélanger, qui était à l’époque âgé de 19 ans. «J’en ai pris, même si je savais que ce n’étais pas bon pour moi. Je voyais bien que des gars qui prenaient des produits du genre avaient des problèmes, comme des palpitations au cœur. Mais pour moi, c’était seulement une partie. Malheureusement, je n’ai pas été chanceux et ils m’ont testé. Nous étions une équipe qui pouvait se rendre jusqu’au bout et nous devions performer. Avec de bonnes performances, plusieurs portes pouvaient s’ouvrir.»

Bélanger est tout de même bien placé pour parler de dopage dans le hockey. Après tout, le jeune homme a passé trois ans de sa vie dans le circuit Courteau. L’ancien ailier droit estime qu’il n’y a pas plus que deux, trois, voire quatre joueurs par équipe qui utilisent des stimulants. «C’est difficile à savoir, car ceux qui en prennent restent tranquilles. Ils ne s’en vantent pas trop non plus. Mais je crois que c’est pas mal moins pire aujourd’hui que ce ne l’était il y a cinq ans, à mes débuts», ajoute-t-il.

Il faut dire que depuis le lancement de la politique antidopage de la ligue en août 2004, les choses semblent aller du bon côté. Depuis l’écart de Bélanger, personne n’a fait les manchettes. La sanction qu’il avait reçue, conformément à la politique dans le cas d’une première infraction, était de huit matchs de suspension.

Changement de cap

Justin Bélanger avait été informé que le résultat de son test avait été positif peu avant que la nouvelle sorte dans les médias. Le coup avait été dur à avaler et il en subit encore les conséquences aujourd’hui.

La nouvelle avait créé tout un émoi chez lui, à Buckland. Un petit village beauceron de 800 âmes. «Ici, j’étais le premier gars à percer et à jouer dans le junior majeur. Imaginez leur réaction quand ils apprennent quelque chose du genre. Mes parents s’en voulaient. Ils se demandaient s’ils avaient fait quelque chose de pas correct, mais ce n’était pas ça.» «En fait, je suis serein aujourd’hui quand je pense à ces événements. J’ai réalisé que le hockey ne me donnerait pas plus de débouchés qu’il le fallait. J’aurais pu persévérer et jouer dans la East Coast et me ramasser à 30 ans sans aucunes études», poursuit Bélanger.

Au moment où l’on se parle, ce dernier vit peut-être les plus beaux moments de son existence. À la suite de sa suspension, Bélanger avait décidé de ne pas revenir dans la LHJMQ pour sa saison de 20 ans. Il n’avait plus le goût de la compétition. Après deux ans d’études en foresterie, l’ancien hockeyeur est maintenant en Californie. Il étudie à l’Académie de golf de San Diego afin de pouvoir travailler dans la gestion de terrains de golf. Il s’agit d’un programme bien rôdé et très reconnu. Justin semble apprécier le climat de la Californie et devrait finir son cours en décembre prochain. Sa volonté de bien apprendre l’anglais l’a aussi poussé à s’envoler pour les États-Unis. «Finalement, c’est peut-être ce que ça me prenait pour me séparer du hockey. Je ne savais plus trop en quoi m’embarquer mais maintenant je sens que peu importe ce que je vais choisir de faire, les portes vont s’ouvrir. Ici, on ne parle pas beaucoup de hockey, c’est surtout le football ou le golf, donc ça m’évite de repenser à tout cela.»

Même s’il évolue dans un domaine presque complètement différent, le nom de Justin Bélanger sera encore pour au moins quelques années associé au dopage. «Tu travailles toute ta vie pour te faire une bonne réputation, mais ce n’est pas long pour la perdre. Maintenant, je continue à m’en refaire une. Je ne veux pas que les gens se fassent une fausse idée sur moi.»