Cimetière St-Joseph: une marche à travers l’histoire

PATRIMOINE. Apprendre l’histoire de sa ville et de ses pionniers en arpentant les allées d’un cimetière, voilà une approche pédagogique peu banale proposée par la paroisse Sainte-Marguerite-d’Youville.

Son coordonnateur Denis Jean en a eu l’idée il y a quelques années en visitant l’un des cimetières anglais les plus anciens au pays, celui de Fort Anne, en Nouvelle-Écosse. Dans ce lieu historique national, les visiteurs suivent à la lueur des chandelles un guide costumé au travers des épitaphes.

À une échelle plus locale, le cimetière St-Joseph à Shawinigan offre lui aussi une immersion dans le passé de la ville avec sa galerie de personnages au profil parfois étonnant.

Ici à l’entrée, on retrouve le monument des St-Onge où sont inhumés quelques descendants d’Antoine St-Onge, fondateur du Village St-Onge, un territoire qui correspond approximativement au quartier Saint-Marc/Christ-Roi aujourd’hui.

Quelques rangs plus loin, on croise celui d’Odilon Sauvageau, le fondateur de la fameuse Librairie Sauvageau au centre-ville. L’un des participants à la visite raconte que tout jeune, il allait manger un sandwich au jambon à la légendaire tabagie fréquentée par Jean Chrétien lors de ses visites en ville. «Ce que j’aime, explique la guide Maya Lavoie-William. C’est quand les gens ajoutent des anecdotes aux éléments historiques que je leur présente. Ça rend la visite plus vivante et intéressante», ajoute celle qui a réalisé tout le travail de recherche de ce projet initié il y a trois ans.

L’orignal, le Belge et le maître d’hôtel

Voici l’épitaphe de J.-Edmond Thibodeau, le plus excentrique des maires de Shawinigan qui déambulait dans les rues du centre-ville de Shawinigan dans une carriole tirée par un orignal domestiqué. L’homme, qui a tenu tête à la Shawinigan Water & Power avec son propre barrage sur la petite rivière Shawinigan, est aujourd’hui enterré tout juste à côté d’un concitoyen qui était son ennemi juré de son vivant…

Certaines pierres tombales sont plus récentes comme celle de Jean-Paul Gignac décédé en 2009. Petit fils de l’un des maires de la ville (Albert Gigaire de 1930 à 1936), l’homme fut le bras droit de René Lévesque lors de la nationalisation de la Shawinigan Water & Power.

Un peu plus loin se dresse celle de Ferdinand Daemen, secrétaire particulier d’Hubert Biermans. Ce journaliste polyglotte parlant sept langues témoigne, avec son compatriote Aquila Dehauffe inhumé lui aussi au cimetière St-Joseph, de la forte influence belge dans la création et le développement de la Ville de Shawinigan au début du XXe siècle. M. Daemen est aussi le promoteur du cénotaphe sur la Promenade du Saint-Maurice qui rend hommage aux soldats shawiniganais ayant combattu lors de la Première et Seconde Guerre mondiale.

Nous voici arrivés devant la pierre tombale de Gérard Lambert, le discret maître d’hôtel qui s’occupait des réceptions civiques à l’Hôtel de Ville. Décédé en 2017, l’homme a côtoyé 9 maires dont il aura toujours eu publiquement de bons mots, emportant avec lui dans sa tombe les travers et secrets de chacun.

Comptant aujourd’hui les restes de 9064 défunts, le cimetière St-Joseph a été créé en 1901, année de fondation de la Ville de Shawinigan. En 1935, la Shawinigan Water & Power céda un lot de 70 000 pieds carrés afin d’agrandir la section la plus ancienne du cimetière qui avait atteint alors sa limite. Soulignons qu’une partie du site est réservé à un cimetière Anglican.

Les visites guidées du cimetière St-Joseph se déroulent du 19 juin au 11 août, du mercredi au dimanche, entre 9h et 16h. D’une durée de 75 minutes, il en coûte 4$ par adulte et 2$ par adolescent pour y prendre part. Info: Maya Lavoie-William au 819 537-6521.