Quand Yves Duhaime remporta sa guerre de Sept Ans

Lorsqu’il se remémore le 15 novembre 1976 et de son élection comme député de Saint-Maurice, Yves Duhaime aime à penser qu’il a remporté ce soir-là sa propre "guerre de Sept Ans".*

«Cela faisait 7 ans que j’y travaillais. J’avais perdu les élections de 1970 et 1973 et celle-ci était ma 3e campagne», se rappelle-t-il au bout du fil. Comme président du caucus régional du Parti québécois (PQ), Yves Duhaime était particulièrement fier de voir le parti rafler la presque totalité de la Mauricie. Seul le libéral Yvon Picotte avait évité l’ouragan en l’emportant par un maigre 403 voix dans Maskinongé.

Pour sa part, Duhaime avait signé une victoire sans équivoque avec une majorité de 4788 votes sur le député libéral sortant, Marcel Bérard. «Nous avions fait campagne sur un Québec propre et le 16 novembre matin, on s’est levé avec un beau tapis de neige tout blanc au sol. Ce fut une grande victoire.»

L’avocat de formation souligne qu’en début de campagne, personne ne se faisait d’illusion sur les chances de former le gouvernement mais tous avait bon espoir de se doter d’une forte opposition. «Mais on a senti le vent tourner au début du mois de novembre. Les pointages nous indiquaient une remontée spectaculaire de notre côté.»

Yves Duhaime fut le seul élu de la Mauricie a faire partie du premier cabinet ministériel de René Lévesque en 1976. Le premier ministre lui confie alors le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. «Comme mandat, il m’avait demandé de faire disparaître les clubs privés de chasse et de pêche de la circulation.» Jusqu’à sa première retraite en politique active en 1985, Yves Duhaime aura collectionné les ministères prestigieux jusqu’à celui des Finances. C’est lui qui aura la tâche de succéder à Jacques Parizeau.

Et comment l’élection d’un député souverainiste dans le comté de Saint-Maurice en 1976 a-t-elle été reçue par son homologue fédéral, Jean Chrétien pour ne pas le nommer? «Nos relations ont toujours été inexistantes et elles le demeurent jusqu’à ce jour», répond du tac au tac Yves Duhaime.

Il se rappelle d’ailleurs de sa première rencontre avec le p’tit gars de Shawinigan dans les semaines suivant son élection. «C’était un souper anniversaire du Club de l’Âge d’or de Saint-Boniface si je me rappelle bien. Jean Chrétien avait pris la parole en premier et il m’avait salué en me présentant comme le député de Saint-Maurice alors qu’il savait que j’étais ministre. Alors quand est venu mon tour, je me suis aussi contenté à mon tour de saluer la présence du député de Saint-Maurice alors qu’il était ministre de l’Industrie et du Commerce à l’époque. Il était insulté noir.»

Le ton était donné entre les deux hommes qui devaient se rencontrer de nouveau quelque deux décennies plus tard lors du référendum de 1995 et de l’élection fédérale de 1997 où Yves Duhaime fut successivement président du Conseil pour la souveraineté et  candidat du Bloc québécois dans le comté de Saint-Maurice contre son éternel rival.

*La guerre de Sept Ans est la conquête de la Nouvelle-France par la Grande-Bretagne et qui a culminé par la victoire des Anglais sur les Plaines d’Abraham.

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