Autobus Fleur de Lys accusée de conduite antisyndicale
JUSTICE. Dans une décision rendue le 2 octobre dernier, le Tribunal administratif du travail (TAT) oblige Autobus Fleur de Lys (FDL) à embaucher deux chauffeurs qui ont été écartés lors du processus d’embauche en raison de leurs activités syndicales du temps qu’ils œuvraient chez Transport Urbain de la Mauricie (TUM).
La juge administratif Lyne Thériault ne mâche pas ses mots dans son jugement, accusant l’employeur de «conduite antisyndicale». L’affaire remonte au printemps dernier lorsque FDL remporte un appel d’offres pour effectuer le transport en commun à Shawinigan. Elle remplace alors TUM qui, faute de contrat, licencie tous ses chauffeurs syndiqués.
Des 16 chauffeurs mis à pied, quinze sont convoqués en entrevue lors du processus d’embauche. Le 16e étant décédé dans l’intermède. Des 15 candidats convoqués, deux ne se présentent pas; deux autres déclinent en cours d’entrevue, invoquant les conditions de travail offertes; et finalement, deux ne sont pas embauchés, en l’occurrence Denise Adam et André Côté, qui œuvraient respectivement comme trésorière et président du syndicat du temps de TUM.
Manque d’esprit d’équipe
La candidature de Denise Adam a été écartée en raison, prétend l’employeur, d’un manque d’esprit d’équipe et de disponibilité. En entrevue, la conductrice aurait dénigré un ancien collègue et affirmé qu’étant proche aidante pour sa mère, ses disponibilités étaient plus restreintes.
Devant la juge, la principale concernée a nié avoir tenu des propos désobligeants envers un collègue qu’elle a qualifié d’ami et souligné que l’employeur ayant ouvert deux à trois postes à temps partiel (25 et 26 heures par semaine), son statut de proche aidante ne représentait pas une contrainte pour occuper l’un d’eux.
Constatant ne pas avoir reçu d’appels au contraire de ses anciens collègues suite à son entrevue, Denise Adam rejoint donc Jean-François Chevalier, coordonnateur aux opérations qui avait mené les rencontres, pour connaître les raisons de sa non-embauche. Pris de court, celui-ci n’offre aucune réponse à la question «c’est sûrement parce que j’étais dans le syndicat». Pour le TAT, il aurait été simple pour le représentant de FDL de citer les deux motifs précédemment mentionnés, soit le manque d’esprit d’équipe et de disponibilité. Au lieu de cela, M. Chevalier suggère à Mme Adam de rappeler dans quelques semaines pour qu’il puisse remettre sa candidature à la responsable des ressources humaines. «Les motifs invoqués par FDL pour ne pas embaucher madame Adam sont cousus de fil blanc. Le Tribunal ne les croit pas.», écrit la juge Thériault.
Un test routier épeurant…
Dans le cas d’André Côté, FDL dit avoir écarté sa candidature en raison d’une performance déficiente lors du test routier. En cours d’audience, Jean-François Chevalier rapporte les propos du formateur, qui a accompagné M. Côté lors du test, qui lui aurait dit «avoir eu peur et ne pas s’être senti en sécurité.» Or, appelé à témoigner, le formateur a nié avoir tenu ces propos. Qui plus est, le rapport rédigé suite au test routier n’en fait également nulle mention.
Vu ces éléments accablants envers l’employeur, la juge Thériault a condamné FDL à embaucher les deux anciens représentants syndicaux. Dans son jugement, elle se réserve le droit d’intervenir ultérieurement sur deux autres points soulevés par Mme Adam et M. Côté, à savoir d’être indemnisés pour le salaire dont les a privés ce refus d’embauche; et le versement de dommages moraux et punitifs pour atteinte au droit d’association.
L’Hebdo a sollicité le point de vue de FDL pour commenter cette décision et est toujours en attente d’un retour.