Compressions dans les cégeps: “La classe n’est pas directement ciblée, mais tout ce qui se trouve en périphérie le sera”

Les six syndicats des cégeps de la Mauricie dénoncent la décision du gouvernement du Québec d’imposer des compressions budgétaires de 151 M$ dans le réseau collégial à travers la province.
Ces coupures surviennent moins d’un an après l’annonce de coupes majeures affectant à la fois le financement en immobilisation des cégeps et par l’imposition de gels de recrutement liés aux postes de la fonction publique.
Au Cégep de Trois-Rivières, il est question d’environ 2 M$ de compressions, tandis que le Cégep de Shawinigan fait face à des compressions financières de 1,5 M$.
“On pensait avoir tout vu et voilà qu’on se retrouve à devoir couper pour 1,5 M$. De ce montant, 1 M$ sera coupé pour le bâtiment et l’achat d’équipements, dont des équipements importants qui étaient attendus dans plusieurs départements. Il reste 500 000$ qui devront être coupés on ne sait trop où. Il y a déjà un gel d’embauche, mais les enseignants ne sont pas touchés parce que ça dépend du nombre d’étudiants. Nécessairement, c’est du côté des professionnels de soutien et des services aux étudiants qu’il y aura des coupures”, avance Luc Vandal, président du Syndicat des enseignantes et enseignants du Cégep de Shawinigan.
“La classe n’est pas directement ciblée, mais tout ce qui se trouve en périphérie le sera selon toute vraisemblance, ajoute Jean Fournier, président du Syndicat des professeures et professeurs du Cégep de Trois-Rivières. Ces compressions vont nécessairement atteindre et réduire la portée des services aux étudiants. À partir du moment où on ne peut pas répondre à un besoin en psychologie, en sexologie, en travail social, pour un conseiller en orientation et que notre milieu de vie s’appauvrit parce que le socioculturel ne peut pas aller aussi loin qu’il le souhaiterait, qu’est-ce que ça génère dans la classe? Ça peut contribuer à une baisse de motivation et à une perte de sens. L’impact sur la classe se fera donc ressentir, que ce soit sur le climat, l’enseignement, la capacité des étudiants à intégrer les savoirs ou à de multiples autres égards.”
En parallèle, on s’attend à accueillir 24 000 étudiants de plus qu’anticipé dans le réseau collégial du Québec pour les cinq prochaines années.
“La CAQ avait promis de faire de l’éducation une priorité nationale. Aujourd’hui, on assiste au sabotage de l’enseignement supérieur, lance Simon Fréchette-Gélinas, président du Syndicat des employés de soutien du Cégep de Trois-Rivières. Ce sont des compression historiques qui viennent compromettre l’enseignement collégial à travers le Québec. Au Cégep de Trois-Rivières seulement, il y a 20 postes qui ne sont pas remplacés chez les professionnels de soutien. Ça entraîne une surcharge de travail et ça mènera probablement à un bris de service et au recours à de la sous-traitance à des coûts plus importants.”
Les coupures annoncées dans les Centres collégiaux de transfert de technologie (CCTT) sont également difficiles à avaler pour Tarik Jabrane, chercheur principal au CCTT Innofibre du Cégep de Trois-Rivières.
“Près de 90% de notre financement est payé par les entreprises. Je ne comprends pas pourquoi on nous coupe une si petite partie symbolique qui venait du gouvernement. C’est une incertitude qui nous inquiète, qui démotive. C’est vrai qu’on offre de la formation, mais on contribue aussi aux entreprises qui comptent sur nous pour former les personnes à l’interne. La formation continue en milieu de travail fonctionne ailleurs au Canada et dans des pays d’Europe, dont l’Allemagne.”
Les représentants syndicaux pointent notamment du doigt Pascale Déry, ministre de l’Enseignement supérieur, pour ne pas avoir défendu les cégeps dans ce dossier. “Dernièrement, la CSN a demandé la démission de la ministre Déry. Ce n’est pas anodin comme demande. On se serait attendu, minimalement, à ce qu’elle se lève pour défendre les cégeps. On comprend que le gouvernement est pris dans une mécanique où on dit qu’on veut couper partout, dont les cégeps, mais à tout le moins, la ministre de l’Enseignement supérieur devrait défendre les cégeps et les universités, mais ce n’est pas le cas”, déplore M. Vandal.
En fin d’avant-midi, des membres des six syndicats des cégeps de la Mauricie se sont déplacés aux bureaux de la députée de Champlain, Sonia LeBel, pour transmettre une communication au sujet de ces compressions financières imposées aux cégeps.