Des tracteurs dans les rues du centre-ville de Trois-Rivières

Plusieurs dizaines de tracteurs ont déambulé en plein centre-ville de Trois-Rivières ce vendredi, s’immobilisant sur la rue des Forges entre Notre-Dame Centre et du Fleuve, afin de sensibiliser les élus à poser des gestes concrets pour l’avenir des entreprises agricoles.

Des agriculteurs venus des quatre coins de la Mauricie à bord de leurs tracteurs ont effectué des trajets pouvant atteindre 90 voire 120 minutes.

« Moi-même ce matin je suis parti en tracteur de Louiseville pour venir ici, raconte le président général de l’Union des producteurs agricoles, Martin Caron. Ça nous a pris à peu près une heure et demie. Il y a des gens de Saint-Tite, ça leur a pris plus que deux heures. Les gens sont vraiment mobilisés et solidaires. »

Ce dernier estime qu’au moins 150 agriculteurs ont démontré leur appui en prenant part à la manifestation et qu’environ 70 tracteurs ont été aperçus sur les routes ainsi que dans les rues du centre-ville.

« C’est une belle journée, on était supposé être dans les champs aujourd’hui mais je pense que notre agriculture va assez mal pour qu’on prenne un avant-midi pour dire haut et fort qu’on veut guérir notre agriculture, a lancé d’entrée de jeu Martin Marcouiller, président de la Fédération de l’UPA Mauricie, aux manifestants rassemblés sur le bord du fleuve. Ça fait un an qu’on dit que ça ne va pas bien en agriculture. On a rencontré nos députés. Oui, on a une écoute sauf qu’il n’y a pas d’actions. Ce qu’on veut, c’est être capable de vivre de notre agriculture, être fiers de notre métier, continuer à nourrir la population et avoir le gouvernement derrière nous pour nous soutenir. »

Au cœur des revendications, l’appui financier du gouvernement en cette période où tout coût plus cher et où les normes ne sont pas les mêmes pour tous de même que la réduction de la paperasse et de la bureaucratie.

« Que ce soit l’inflation, les taux d’intérêt, les changements climatiques. On nous impose des normes et on ne protège pas notre territoire agricole. C’est rendu qu’on a même des cédants qui disent: « J’aime mieux démanteler que céder à ma relève, parce que ce n’est pas vrai que je vais faire vivre ça à mes enfants. » Ce n’est pas normal. »

« Toute cette bureaucratie-là, cette lourdeur administrative, ça fait des années qu’on dénonce que des producteurs maraîchers ont 15, 16, 18 documents à remplir par année, a dénoncé M. Caron. La population, au dernier sondage, nous fait confiance à 94 %. Quand est-ce que nos ministères et notre gouvernement vont nous faire confiance et vont nous reconnaître comme des professionnels de l’agriculture? »

En entrevue à l’Hebdo, M. Caron a expliqué sa déception à la présentation du dernier budget provincial.

« Le 12 mars dernier, il n’y avait aucune somme de plus au niveau du budget. Dans les cinq dernières années, on a investi énormément sur nos fermes, on a investi six milliards en agriculture parce qu’on y croyait par rapport à l’autonomie et la sécurité alimentaire. Et présentement, à la place de nous soutenir davantage, on vient chercher de l’argent dans nos poches par des éco-frais, des coûts que les autres provinces du Canada, que les autres pays ne payent pas. Les producteurs ne peuvent plus s’endetter pour nourrir les gens. Ça prend des actions concrètes et un soutien économique pour l’agriculture. C’est un projet de société de nourrir notre monde. Si on dit que c’est une priorité, on n’investit pas moins de 1 % dans le budget. »

Le président général de l’Union des producteurs agricoles, Martin Caron, le président de la Relève agricole de la Mauricie, Raphaël Grenier-Damphousse et le président de la Fédération de l’UPA Mauricie, Martin Marcouiller.

Relève agricole

Le nouveau président de la Relève agricole de la Mauricie, Raphaël Grenier-Damphousse, souhaiterait un peu plus de vision de la part du gouvernement du Québec.

« Pourquoi on ne pourrait pas avoir une vision de l’agriculture? Qu’on se dise, nous on veut avoir des normes sévères, parce que c’est ça que la population veut, ce que le gouvernement nous dit, mais il faut vendre au prix international alors qu’on n’a pas les mêmes normes. On voit Bécancour en construction, les batteries c’est l’avenir, on investit. Pourquoi on n’investirait pas dans les biocarburants? On pourrait liquider notre grain au lieu de l’envoyer transformer à l’exportation, ça ferait du bien d’avoir des achats de plus. »

M. Grenier-Damphousse a également exposé les défis de plus en plus ardus de la relève.

« Il y en a des gens de la relève, mais ils ne sont pas capables de s’établir dans le contexte financier actuel. Qui est capable d’acheter une entreprise déjà existante puis de vivre de ça? C’est impossible! »

« Au niveau de la relève, 44 % des jeunes présentement ont un emploi à l’extérieur pour essayer d’arriver sur la ferme, ajoute M. Caron. C’est inacceptable. Nos gens font des 70 heures et plus et doivent aller travailler pour aller chercher de l’argent. On veut vivre de l’agriculture. Présentement c’est plus de la survie. »

Le député de Maskinongé, Simon Allaire, la députée de Champlain et présidente du Conseil du Trésor, Sonia LeBel, le député de Trois-Rivières, ministre du Travail et ministre responsable des régions de la Mauricie, de l’Abitibi-Témiscamingue et du Nord-du-Québec, Jean Boulet et la députée de Laviolette-Saint-Maurice, Marie-Louise Tardif.

Réaction des élus régionaux

Les quatre députés caquistes de la région assistaient à la manifestation. Le ministre régional, Jean Boulet, s’est adressé à la foule, ses collègues à ses côtés.

« Vous êtes un secteur crucial pour le Québec. Vous êtes le garde-manger des Québécois et des Québécoises. On est venus vous dire qu’on vous comprend, qu’on est à l’écoute, qu’on a énormément de respect pour vous. Continuez d’être fiers de ce que vous êtes. Et nous, on va continuer d’être solidaires avec nos collègues à en faire plus. Vous avez des représentants avec lesquels on a un dialogue qui se poursuit. On veut être vos porte-voix à Québec. Vos actions, comme cette manifestation, nous aident à mettre de la pression là où il faut. »

Le quatuor a quitté la zone de prise de parole pendant que les manifestants ont scandé « Agissez! » à une douzaine de reprises.