L’an 2000: Shawinigan-Sud, la mégalomane…
MILLÉNAIRE. La frénésie entourant le passage à l’an 2000 n’a épargné personne, encore moins nos élus locaux.
Il y a vingt ans, la MRC du Centre-de-la-Mauricie était composée de douze municipalités avec comme noyau urbain: Shawinigan, Grand-Mère et Shawinigan-Sud. Du trio, c’est cette dernière qui fera preuve du plus de zèle pour commémorer le nouveau millénaire.
L’administration du maire Maurice Héroux commande dans un premier temps à Fernand Racine une horloge du millénaire qui sera érigée sur un terrain appartenant à la fabrique Saint-Sauveur, à l’angle de la 124e rue et de la 5e avenue (aujourd’hui 105e avenue). Haute de 17 pieds, l’horloge est installée sur une base de béton sur laquelle est gravé un cadran solaire. La Place du Temps est née.
Shawinigan-Sud est à cette époque une ville-dortoir composée majoritairement de jeunes familles. La Promenade du Capitaine n’est aménagée que depuis quelques années et les élus y font planter douze arbres, chacun étant jumelé à un mois du calendrier. Les noms de chaque enfant né en 2000 sont ainsi gravés sur une plaque de marbre correspondant à son mois de naissance.
Mais ce qui marquera les esprits de l’époque demeure sans aucun doute le projet des Grandes Eaux. Inauguré en juillet 2000, ce système de jeux d’eau et de lumière, installé sur un quai flottant du côté de la Promenade du Capitaine, est pompeusement comparé par les politiciens locaux aux fontaines de Versailles et Las Vegas quand ce n’est pas Genève.
«Se moquer de ce dossier comme on l’a fait, c’est se moquer des aspirations légitimes et nobles des gens d’ici», déclare solennellement lors de l’inauguration Martin Cauchon, ministre du Revenu national dans le gouvernement Chrétien. L’équipement d’un demi-million de dollars est en fonction tous les jours, de 11h à 21h entre mai et septembre, avec un déploiement d’une trentaine de minutes pour chaque séquence.
«Bénissons le Seigneur qui a permis que nos taxes nous procurent désormais un si beau spectacle», s’extasie le Dr Henri Bilodeau, président de la société d’histoire Héritage Shawinigan et l’homme derrière cette mégalomanie. Une déclaration avant le débat sur la laïcité de l’État bien sûr…
C’est à la Ville de Shawinigan et à la Cité de l’énergie que ce projet avait été présenté une première fois en 1997. Devant la tiédeur de ses interlocuteurs, le Dr Bilodeau avait traversé la rivière. Ironie de l’histoire, l’équipement sert aujourd’hui au spectacle nocturne présenté… par la Cité de l’énergie.
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