Les premières étoiles du match

SANTÉ.  En consultant le sommaire du match du 6 janvier dernier perdu par Shawinigan au compte de 6 à 4 contre Chicoutimi, on ne trouvera nulle trace du fait saillant de la partie : le sauvetage in extremis en première période de Martine Gauthier par des membres de l’organisation et de l’équipe de sécurité des Cataractes. 

Dès les premières minutes de la rencontre, la Shawiniganaise se sent étourdie, croyant faire une crise d’hypoglycémie comme il lui arrive parfois. « J’ai envoyé mon chum me chercher quelque chose de sucré et quand il est revenu, j’étais étendu par terre, sans connaissance. J’ai eu des haut-le-cœur et j’ai vomi. C’est ce qu’on m’a dit parce que moi, je n’ai plus souvenir de rien », raconte cette amatrice de hockey présente à tous les matchs.

De l’autre côté de la patinoire, entre les bancs de punition, le marqueur des Cataractes Martin Gélinas est interpellé au même moment par deux personnes qui frappent frénétiquement sur la baie vitrée derrière lui. « Ils demandaient de l’aide pour une personne en détresse. Il y a beaucoup de gens à l’aréna qui connaissent mon passé d’infirmier », explique le bon samaritain en vacances en Jamaïque lorsque L’Hebdo le rejoint.

Profitant d’un arrêt dans la rencontre alors qu’un joueur des Saguenéens est gravement blessé, nécessitant même une civière pour le transporter, Martin Gélinas décide instinctivement de traverser rapidement la patinoire au grand étonnement d’un arbitre. « Il avait l’air de se demander : Qu’est-ce qu’il fait celui-là? J’ai ramassé au passage ma copine (Julie Guillemette) qui est aussi infirmière et on s’est rendu jusqu’à la dame. »

Un arrêt cardiorespiratoire

Arrivé sur place, Martin Gélinas constate avec soulagement que les gens qui entourent Martine Gauthier l’ont mise en position latérale de sécurité. « Je faisais des tests pour voir comment elle réagissait à la douleur et elle avait très peu de réactions. De plus, elle avait une respiration bizarre. Son mari me disait qu’elle faisait une baisse de sucre, mais j’y croyais plus ou moins avec ce que je voyais », se souvient celui qui a œuvré pendant plus de vingt ans dans les urgences et les soins intensifs.

Deux ambulances sont alors appelées en urgence au Centre Gervais Auto : une pour le joueur Jérémy Leroux et une autre pour la Shawiniganaise. L’ordre est donné de diriger les premiers ambulanciers qui se pointeront à l’aréna dans les estrades plutôt que sur la glace. En attendant, Martin Gélinas s’assure de surveiller le pouls de Martine Gauthier.  « Malgré qu’elle était inconsciente, elle maintenait sa respiration. Nous n’avons pas eu à faire de manœuvre extraordinaire. Cela a facilité notre travail », dit celui qui œuvre maintenant en santé mentale, mais qui de toute évidence a conservé ses vieux réflexes.

Dans l’ambulance, Martine Gauthier fait un arrêt cardio-respiratoire et doit être branchée sur un respirateur pour la maintenir en vie. Transportée au centre hospitalier régional Sainte-Marie à Trois-Rivières, elle est placée dans un coma artificiel pour la stabiliser.  Elle sera maintenue dans cet état durant huit jours pendant lesquels d’innombrables tests sont menés. « Après un scan du cerveau, ils ont découvert que j’ai eu une activité épileptique et que ça expliquait aussi mon arrêt cardiorespiratoire », témoigne celle qui n’avait jamais vécu ce malaise auparavant.

Des retrouvailles émotives

Le 29 janvier dernier, Martine Gauthier est retournée pour la première fois depuis ce dramatique épisode à une partie des Cataractes. Elle avait préalablement demandé au directeur général administratif, Daniel Jacques, d’organiser une rencontre avec les bons samaritaines qui lui ont sauvé la vie. « L’infirmière (Julie Guillemette) me tenait la main et elle était tellement contente de me voir en vie. J’avais des larmes aux yeux. Je les ai remercier je ne sais pas combien de temps tellement j’étais contente. Ces gens-là ne sont pas médecins, mais ils m’ont sauvé la vie », témoigne-t-elle.

De son côté, Martin Gélinas confirme que l’émotion était également forte pour lui et sa conjointe. « J’en parle encore aujourd’hui et je deviens émotif. On ne fait évidemment pas ça pour avoir les honneurs, mais quand une affaire comme celle-là arrive et que la personne vient te voir pour te dire merci pour ce que tu as fait, c’est le fun à entendre et ça fait du bien. »

De retour à son banc de marqueur pour la 2e période, Martin Gélinas est repassé devant l’arbitre. « Je lui ai dit que j’avais eu une envie pressante  avant de lui donner la vraie raison. J’ai dit à mes amis que je ne ferais pas ça toutes les semaines et que mes collègues avaient besoin de moi en bas. Mais je suis content aujourd’hui que tout soit fini pour le mieux », conclut le sympathique infirmier qui aurait, avec ceux qui ont participé à ce sauvetage, certainement mérité la première étoile du match.