Les premiers escargots du terroir sont à Mont-Carmel

AGRICULTURE. Elisanne Landry arrose les 5000 escargots du Maroc qui viennent de débarquer chez elle à Notre-Dame-du-Mont-Carmel, puis elle leur donne une branche de céleri au passage. Ce qui était à l’origine une blague est visiblement en train de se concrétiser: elle opérera la première escargotière du Québec.
Partie à Montréal pendant 10 ans, la jeune femme de 32 ans a mis sa carrière en développement des affaires dans le domaine des technologies de l’information sur pause pour miser sur ce projet inusité qui suscite déjà un engouement certain.
Elle cherchait un moyen d’exploiter la terre familiale avec un élevage qui ne serait pas trop exigeant. «On niaisait, on faisait des blagues. À un moment donné on a pensé aux escargots. J’ai trouvé ça tellement drôle que je me suis informée, puis, finalement, je suis devenue une passionnée d’escargots.»
Elle s’est même rendue jusqu’en France pour travailler sur une ferme d’escargots pour en apprendre davantage sur les différentes étapes et méthodes pour élever ces bestioles. «Je me suis rendue compte qu’il n’y avait rien d’insurmontable dans notre climat québécois. J’ai décidé de me lancer.»
À pas d’escargot
Un cours de lancement d’entreprise et un plan d’affaires plus tard, elle se retrouve avec des milliers de bêtes, arrivées directement du Maroc il y a près de deux semaines.
«Ils mangent un peu n’importe quoi, je les nourris avec de la salade, des carottes, ceux-là je leur ai donné une banane», explique-t-elle en pointant l’une des caisses qu’elle a bricolées. «Je fais des tests. Je n’ai personne à qui me référer. Je ne sais jamais exactement ce que je fais», concède-t-elle.
Elisanne Landry avance un peu à tâtons dans ce nouveau monde qui s’offre à elle. «Normalement les agriculteurs connaissent très bien leur domaine, mais quand ils arrivent pour vendre, ils ne savent pas trop par où commencer. Moi c’est le contraire, la vente c’est l’étape que je maîtrise le mieux. Les garder en vie, ça me stresse un peu plus.»
S’il y en a plusieurs aux États-Unis, elle n’a pas trouvé d’autres escargotières au Québec, ni au Canada. Pour le moment, elle est à l’étape de la reproduction. Viendra ensuite l’étape de la nurserie, puis celle de l’engraissement, vers le mois de juin, qui se fera dans le champ adjacent au garage où se fait l’élevage.
«Ça prend beaucoup d’équipements et de terrain, mais on avait déjà tout ça parce que mon frère a une entreprise connexe. Ça représente un investissement de 250 000$ pour toutes ces infrastructures.» La nouvelle agricultrice songe à lancer une campagne de sociofinancement pour soutenir les débuts de sa production.
300 000 escargots prêts pour la vente cet été
Un escargot peut apparemment avoir une centaine d’enfants. «Je prévois avoir 300 000 escargots cet été», laisse tomber l’éleveuse en herbe. Cette cohorte d’escargots nés à Notre-Dame-du-Mont-Carmel sera prête pour la vente en juin ou juillet.
Après la cueillette, le triage et l’abattage, les bêtes seront destinées aux restaurateurs, aux traiteurs et aux boutiques fines qui souhaitent travailler avec des produits locaux. Ces derniers pourront recevoir la chair congelée, les escargots pré-cuisinés ou carrément vivants. «Ça a l’air de rien comme ça, mais une fois cuisinés… c’est succulent!»
La jeune femme est étonnée de la réponse jusqu’à maintenant lorsqu’elle parle de son projet. «Je pensais être confrontée à un mur. Tout le monde capote, les gens m’encouragent, les restaurateurs sont emballés.»
Jeudi soir dernier, Elisanne Landry organisait une soirée de dégustation privée avec des acteurs du monde de la restauration en Mauricie. Une sorte de pré-lancement, où elle pouvait tâter le terrain, recevoir des premiers commentaires sur son produit avant la mise en marché. Pour le moment, la ferme devrait se nommer «Les escargots champêtres».