Organismes communautaires en grève à Shawinigan

GRÈVE. À Shawinigan, plusieurs organismes communautaires annoncent une grève du 20 au 24 octobre afin de dénoncer le sous-financement chronique du secteur. Le mouvement, qualifié de “sans précédent”, touchera aussi la MRC de Mékinac et pourrait s’étendre à d’autres régions de la Mauricie.

“Ça fait des années qu’on parle de sous-financement des groupes communautaires. On a fait des manifestations, des lettres, de la revendication, de la représentation, on a tout essayé. Le seul outil qu’on n’avait pas encore utilisé, c’est la grève des services”, explique Mathieu Gélinas, directeur du Centre d’action bénévole (CAB) Trait d’union à Shawinigan.

Selon lui, l’objectif n’est pas de créer la panique, mais de faire comprendre au gouvernement les impacts réels du manque de financement. “On veut réclamer de meilleures conditions de travail pour nos travailleuses et travailleurs du communautaire. L’argent qui manque, ce n’est même pas pour développer des services, c’est juste pour maintenir ceux qu’on offre déjà”, affirme t-il.

À Shawinigan, environ 25 organismes ont obtenu un mandat de grève. Selon M. Gélinas, jusqu’à 80% des groupes communautaires pourraient y participer. Durant cette période, plusieurs services seront suspendus, notamment l’accompagnement pour le transport médical, le service de popote roulante et les interventions de rue. “Oui, il y aura un engorgement du système public, mais toutes les études démontrent qu’un dollar investi dans le communautaire génère 12 dollars d’économie en santé. L’argent investi dans nos organismes est rentable socialement”, plaide-t-il.

Le directeur souligne que la fatigue et l’épuisement frappent durement les équipes. “On a du roulement de personnel, des salaires qui ne suivent pas. J’ai des collègues qui tombent en arrêt de travail. On est toujours en train de chercher de l’argent. C’est une pression constante.”

La mobilisation régionale s’inscrit dans la Semaine nationale de l’action communautaire autonome. Une marche aura lieu le 22 octobre à Shawinigan, et une action nationale est prévue le 24 octobre devant l’Assemblée nationale à Québec.

“On veut envoyer un message clair au premier ministre: il faut ouvrir un dialogue avec les groupes communautaires. Juste en Mauricie, il manque 98 millions de dollars. À Shawinigan seulement, on parle d’un manque de 11 millions pour répondre aux besoins réels de la population”, ajoute M. Gélinas.

À la Maison des jeunes de Shawinigan-Sud, les impacts de ce sous-financement se font déjà sentir. ” L’année passée, on a doublé notre fréquentation, mais je n’ai pas plus de financement ni de personnel pour répondre aux besoins. Cet été, on a perdu deux employés, on est tombés à trois au lieu de six. C’est très difficile, on est vraiment à bout”, témoigne son directeur, Mathieu Lafontaine.

Selon lui, la grève vise avant tout à préserver la stabilité des équipes pour maintenir le lien avec les jeunes. “Pour que les jeunes s’ouvrent aux intervenants, il faut un lien de confiance. Mais si on a du roulement tous les six mois, ils se ferment et on ne peut plus les aider. Si le gouvernement nous écoute, on pourra garder nos employés et mieux les rémunérer. C’est ça qui permettra de s’occuper réellement des jeunes.”

Pour les deux directeurs, la mobilisation est un passage obligé. “C’est malheureux d’en arriver là, mais on n’a plus le choix”, résume M. Gélinas.