Une expertise shawiniganaise qui survit aux papetières

TECHNOLOGIE. René Larivé a travaillé comme chercheur pour une papetière une grande partie de sa vie. L’expertise qu’il a développée dans le secteur Grand-Mère à Shawinigan a su perdurer au-delà de la fermeture des usines en région, par le biais de l’entreprise qu’il a créé, Comaintel.

«J’étais chercheur dans la bâtisse ici», explique René Larivé, qui travaillait à l’époque pour le centre de recherche de Consolidated Bathurst, qui opérait l’usine Laurentide dans le secteur Grand-Mère. Il dirigeait une équipe de techniciens et d’ingénieurs.

«Un de nos projets était d’améliorer le contrôle de l’uniformité de l’épaisseur du papier. Ça a mené à une invention, qui est présentement commercialisée par Comaintel et qui se retrouve présentement dans la majorité des machines à papier dans le monde», explique René Larivé.

Comment ça fonctionne? Il faut d’abord savoir que la chaleur créée au contact de deux rouleaux utilisés pour la fabrication du papier ou de feuille de métal fait en sorte que l’un d’eux se déforme, ce qui crée une feuille d’épaisseur inégale.

Si les rouleaux entre lesquels glissent le papier ou le métal ont déjà été chauffés à l’eau ou à l’huile pour être modulés, un modèle «archaïque» selon M. Larivé, la technologie de Comaintel propose un système de chauffage par induction électromagnétique qui permet de modifier le diamètre des différentes sections de l’un de ces rouleaux sur toute sa longueur, ce qui permet de mieux uniformiser l’épaisseur du papier.

Comaintel permet ainsi aux entreprises de produire des feuilles de meilleure qualité et d’augmenter la vitesse de production des machines à papier, tout en réduisant les pertes. La fabrication de cette technologie à induction se fait à la main, toujours dans le secteur Grand-Mère.

Si ce système est si populaire dans le monde c’est qu’il s’agissait d’un réel problème. «On aime à dire que nos systèmes se vendaient tout seuls, parce que les papetières qui n’en avaient pas n’étaient pas capables de rencontrer les normes de qualité des imprimeries», explique René Larivé.

Après le papier, le métal

Lorsque les usines Belgo et Laurentide ont fermé, Comaintel avait déjà conquis d’autres marchés à l’international. «Ça ne nous a pas fait paniquer», explique l’inventeur.

Reste que vers la fin des années 90, alors que Comaintel était une jeune entreprise, environ 90% de son chiffre d’affaires provenait des papetières. «Aujourd’hui, c’est plus la moitié», explique René Larivé. «L’industrie du papier est quand même bonne pour nous, mais nous nous sommes diversifiés.»

Cette diversification passe notamment par les usines de transformation de l’aluminium, qui ont les mêmes problèmes que les papetières. Ces usines transforment l’aluminium en minces feuilles qui servent notamment à la  fabrication de canettes de boissons gazeuses ou de pièces d’automobiles, par exemple.

«Dans le domaine de l’aluminium, nous sommes un leader mondial. Nous sommes l’unique fournisseur», informe Christian Descôteaux, directeur des ventes et du marketing pour Comaintel. «Pour ce qui est du papier, on a des compétiteurs, mais nous avons une offre beaucoup plus large et flexible qu’eux.»

L’entreprise est aussi en train de développer le marché de l’acier depuis un an. «On est en mode "test" avec des leaders mondiaux dans le domaine», poursuit Christian Descôteaux.

Comaintel connait une belle croissance dans la dernière année. «On ouvre de nouveaux marchés géographiques, mais aussi de nouvelles applications comme la lamination», explique Christian Descôteaux. «Cette croissance coïncide avec l’arrivée de Christian chez Comaintel», tient à ajouter René Larivé, qui connait surtout l’industrie du papier. C’est la première fois qu’on embauche quelqu’un pour développer de nouveaux marchés.

Un marché à l’international, mais un attachement local

«Plus de 90% de notre chiffre d’affaires est fait à l’extérieur», informe Christian Descôteaux. Les produits de Comaintel se retrouvent donc aux États-Unis, en Europe, en Asie, en Chine. L’entreprise compte quelques clients dans la province de Québec et un seul en Mauricie, l’entreprise WestRock à La Tuque.

«Beaucoup d’entreprises produisent de l’aluminium en lingots, mais nous servons à la transformation de lingots en feuilles. Il n’y a aucun laminoir au Québec», explique Christian Descôteaux.

Si les clients se retrouvent partout dans le monde, on a choisi de rester ici. «On avait des contacts qui nous permettaient de faire des essais à l’usine Belgo. Lorsqu’elle a fermé, on a eu des discussions à savoir si on resterait à Grand-Mère. On pourrait être à Montréal, aux États-Unis, n’importe où. Mais ce serait vraiment difficile de recommencer avec de nouveaux employés», croit René Larivé.

L’entreprise familiale fondée dans les années 90 compte désormais une quinzaine d’employés. Auparavant, ceux-ci se consacraient beaucoup à la recherche, aujourd’hui ils travaillent surtout à la production des systèmes.

Comaintel est dirigée par René Larivé, qui se retire peu à peu, son fils Sylvain Larivé et sa belle-fille Élisabeth Leclerc.