2016, la Jamésie en cadeau

CHRONIQUE. Lors de mon voyage à Radisson en Jamésie (Baie-James), du 28 juin au 8 juillet 2015, j’ai fait la sympathique rencontre d’un moine de la nature nommé Sylvain Paquin qui vit à la façon de feu le Vieil Ermite de Grandes-Piles. Que de similitudes dans les faits, que de ressemblances physiologiques, que d’analogies d’un mode de vie aussi original. En somme, son véritable sosie!…

Sylvain est né à Montréal, le 18 mars 1965. Il aura donc à ce jour 51 ans. Il a vécu une partie de son adolescence à Manseau mais il connait bien la Mauricie pour y avoir habité dans une roulotte à Lac-aux-Sables et y avoir fait les 400 coups à Shawinigan. C’est un homme d’honnêteté, d’humilité, d’intégrité, d’effacement, affable, aussi courtois que réservé, capable d’émerveillement. Il est un autodidacte de sa profession. Consultant en développement touristique, il admet l’influence marquée de Max Gros-Louis dans la pratique de l’écotourisme. Sylvain est un virtuose de la photo-nature. Il participe à plusieurs émissions de télévision en tourisme. En 1990, il fonde une entreprise en multimédia et produit plusieurs documentaires.

L’appel du Grand Nord

En 1997, à 29 ans, l’appel du Grand Nord le mobilise pour un contrat en graphisme. Il se construira un wigwam dans la forêt, y habitera de façon permanente, y perdra plus de 90 livres, se guérira de plantes et de racines et ne redescendra plus dans le sud. Aujourd’hui, Sylvain se vit en parfaite autonomie, en parfaite symbiose avec la nature, sans permis de conduire, voyageant exceptionnellement par auto-stop. Une fois l’an, il met en provision 20 kilos de pâtes, 20 kilos de farine, 30 pains, 15 kilos de beurre d’arachide, 5 kilos de confiture. Toutes ses réserves sont enfouies et conservées dans la terre sous le camp grâce à des bidons de 4 litres d’eau surgelée. Il se vit sans électricité. Un panneau solaire alimente une mini-génératrice qui pourvoit au bon fonctionnement de son ordinateur. Il brûle par année, 2,600 palettes de bois, moins d’arbres coupés, moins d’encombrement au dépotoir municipal.

Chef de meute de chiens et chiens-loup

Il ne chasse que pour sa consommation en viande, pour lui et sa meute de chiens et chiens-loup. Il en est le chef de meute. Celle-ci est sa vraie famille. Sa meute jappe pour l’avertir qu’une personne connue foule le sol de son territoire. Ces mêmes bêtes grognent pour lui signifier qu’un parfait étranger ou une bête sauvage envahit son lopin de terre. À l’extérieur, couché sur une peau de caribou pour y prendre un bain de soleil, sa famille canine le réchauffe, le sécurise en l’encerclant.

Un être souverain de l’âme

Sylvain est un être de liberté, d’autonomie et d’indépendance. Il est un grand souverain de l’âme pour qui les sordides lois toutes faites du monde ambiant, celles du plus fort, celles du plus grand nombre, celles des convenances, celles de la raison n’ont aucune emprise sur lui et constituent la forme de dictature la plus dévastatrice pour l’être humain. Y donner force et suite, c’est se restreindre à se vivre dans l’inaccompli, c’est méprisé son identité profonde. C’est ainsi qu’on évite de se faire imposer des ignominies infamantes. Il est un homme de cœur pour qui vivre à la Baie James exige qu’on y habite pour la vraie raison, celle d’un mode de vie basé sur la nature, la villégiature, la culture et le partage et non pour celles de l’hypocrisie et de l’appât du gain. Son discours est douceur et authenticité.

Il est un grand conquérant de la vraie vie, simple, humble et digne qui mène sans ambages à la prospérité de l’âme. Pour lui, la solitude n’est pas de l’isolement ou l’absence de compagnie, elle est le temps précieux d’écouter son cœur, de converser avec son moi profond. Sa valise de voyageur solitaire est remplie à craquer du soleil du jour, du ciel bleu sans nuage, du clair de lune, du firmament bondé d’étoiles, du sifflement du vent, du gazouillis des oiseaux, du hurlement du loup sans omettre les jours de tempête et de cieux menaçants qui invitent à la prudence d’action et à la récupération psychosomatique.

Il inspire, gère et guide le Camp des Pins, propriété de la nation Cri. Que 2016, nous permette de s’offrir la Jamésie (Baie James) en cadeau, ce sera alors l’occasion de prendre un bain d’humanisme, de resourcement et d’intégralité au pays d’en-haut, la glacière du Québec.