Complices depuis 70 ans

MARIAGE. «Fais attention à ce que tu vas dire», interrompt Jean avec le sourire lorsque je demande à son épouse la plus belle qualité de son mari…

Le regard complice et amoureux, voilà ce qui décrit le mieux Jean Fugère et Louisette Roy qui ont été l’objet samedi dernier d’une fête à la Résidence Grand-Mère pour souligner leur 70e anniversaire de mariage.

Celui-ci aura lieu précisément le 14 juin prochain mais la parenté a profité du grand weekend pascal pour démontrer leur appréciation au couple. Et du monde, il y en avait: elle vient d’une famille de 18 enfants alors que lui partageait la table avec 11 autres frères et sœurs. À 90 et 92 ans respectivement, Louisette et Jean ont vécu une belle vie.

Le secret de leur longévité? «Faut pas casser la corde. Faut défaire les nœuds»      – Louisette

Comme presque toutes les femmes de sa génération, elle a élevé seule leurs cinq enfants et vu à leur éducation pendant que lui gérait des chantiers de bûcherons pour Consolidated Bathurst en Haute-Mauricie. «J’ai aimé ma vie en forêt. Moi, tout seul dans le bois, je suis heureux», raconte celui qui bûchait encore son bois l’an dernier sur sa terre de 240 arpents à Saint-Élie-de-Caxton.

«Il pouvait parfois être six mois dans les chantiers avant de redescendre», souligne Louisette. Avant que les enfants n’entrent à l’école, toute la famille accompagnait parfois le papa à Mattawin ou Rivière-aux-Rats où il bossait.

Le jeune marié fait le taxi

Avant de se marier, les jeunes tourtereaux se sont fréquentés durant deux ans et demi. «On s’est laissé six mois mais on est revenu», précise Louisette. Ils se rappellent comme si c’était hier de la journée du 14 juin 1949 à l’église de Saint-Luc-de-Vincennes. Lui, un gars de la place et elle, une nouvelle venue dont la famille du Cap-de-la-Madeleine venait d’acheter une ferme dans le village. «Il faisait beau ce jour-là mais durant la veillée à la Plage du Bouleau, à Saint-Narcisse, ça été le déluge. Tellement que moi, le nouveau marié, j’ai dû faire le taxi pour ramener chez eux les gens qui n’avaient pas de voiture», rit de bon cœur Jean.

Comme beaucoup de nouveaux mariés à cette époque, le jeune couple met le cap sur la Gaspésie pour leur voyage de noces. À leur retour une semaine plus tard, une autre soirée était organisée comme c’était la tradition raconte Louisette qui avait revêtu pour l’occasion sa robe de mariée.

Souvenir de juin 1949 alors que le jeune couple fait le tour de la Gaspésie durant leur voyage de noces.

Comme c’était la coutume à l’époque, le journal local publie un court texte pour annoncer le mariage. «Pour voyager, Mme Fugère portait un tailleur rouge chinois, un chapeau de bakou naturel, souliers et accessoires bruns.», peut-on lire sur une découpure conservée précieusement par le couple.

Après avoir résidé brièvement à Saint-Luc-de-Vincennes et Saint-Stanislas, ils s’établissent à Grand-Mère au milieu des années 1950. Ce n’est que l’an dernier qu’ils vendent leur maison pour aller demeurer à la Résidence Grand-Mère. Du haut du 6e étage, ils ont une vue imprenable sur les montagnes boisées et les couchers de soleil. «Ça me rappelle ma vie dans les chantiers. Moi, je trouve ça beau les arbres», raconte l’ancien contremaître.

Et la plus belle qualité de M. Fugère finalement? «C’est un homme travaillant et un bon père de famille», complimente Louisette. Et la plus belle de madame? «C’est une femme adroite de ses mains. Elle peut virer des montagnes à l’envers», termine tendrement Jean.