Nos vétérans se souviennent

Un legs précieux pour la Légion royale canadienne

SOUVENIR. Dans un petit salon du sous-sol des Jardins du Campanile, quatre vétérans ayant servis leur pays sont accompagnés par quatre membres de la Légion royale canadienne filière 44. Tous en uniformes, ils attendent l’auteur de ces lignes pour une rencontre afin de discuter de leurs souvenirs liés à la guerre. Un point commun les unit, celui de la passion d’avoir servi leur pays!

Âgés respectivement de 99 ans, 98 ans, 94 ans, et 89 ans, J. Marcel Girardeau, Albert Pellerin, Rita Vézina-Willet et Jean-Paul Patry sont toujours très allumés pour leur âge. Café et beignet à la main, ils replongent dans leurs souvenirs, qu’il s’agisse de la Deuxième Guerre mondiale pour les trois plus âgés du groupe, ou la Guerre de Corée pour M. Patry.

Mme Rita Vézina-Willet s’est enrôlée dans l’armée canadienne en 1943. Après avoir reçu sa formation à Kitchener en Ontario, elle a été mutée à la citadelle de Québec en tant qu’aide de camp pour la commandante. «J’avais 17 ans et je n’avais pas le droit de m’enrôler, j’ai été menteuse! Mais je voulais servir mon pays. C’était pour vivre une aventure. J’étais sous les ordres de la commandante et je faisais tout ce qu’elle me disait. J’étais aide de camp. Je m’occupais des habits de la commandante, etc. J’ai aimé ça et je suis fière de ce que j’ai fait. J’aurai aimé continuer plus longtemps.»

Après la Deuxième Guerre mondiale, Mme Vézina s’est mariée à un M. Willet. Ce dernier avait été un prisonnier de guerre par l’armée allemande. «Il avait de la misère à parler de ça et il faisait des cauchemars.»

«Ce sont nos modèles!»

-Robert Trépanier

C’est à l’âge de 20 ans en 1941 que J. Marcel Girardeau s’est enrôlé. «J’étais dans un régiment d’artillerie comme un peu tout le monde au départ, puis j’ai été muté à un régiment de mitrailleuses. Je faisais l’instruction de l’utilisation des mitrailleuses. J’ai traversé en Europe en 1943. Après le débarquement de la Normandie, j’ai été affecté à Calais. On recevait les munitions et les armes pour continuer à avancer dans l’Europe. C’était tout du matériel neuf qui arrivait de l’Angleterre et qui traversait la Manche.»

L’histoire la plus marquante pour M. Girardeau a été de rester dans une famille française. Deux jeunes Allemands demeuraient avec cette famille avant l’arrivée de M. Girardeau. «Les jeunes Allemands ne voulaient pas se battre, ils étaient pratiquement de notre bord. Ils ne voulaient pas la guerre. Quand on est arrivé, ils sont partis. J’ai revu cette famille française des années plus tard après la guerre. Elle est venue me voir ici, et je suis allé aussi en France. Même que les deux jeunes Allemands sont aussi retournés voir la famille de Français. Ça m’a fasciné!»

De façon très humble, M. Girardeau soutient que c’était «bien ordinaire» ce qu’il a fait en Europe. «Je n’étais pas sur la ligne de front. Je n’ai pas fait d’acte de bravoure. J’avais des responsabilités, mais j’avais un revolver et je ne m’en suis jamais servi. Je l’ai eu easy (facile).»

Marcel Girardeau – 99 ans

Service militaire de 1941 à 1946

Médaille service volontaire 1939-1945

Médaille de la guerre 1945

Régiment d’infanterie et de mitrailleuses

 

Rita Vézina-Willet – 94 ans

Service militaire de 1943 à 1946

Médaille service volontaire 1939-1945

Aide de camp

 

Albert Pellerin – 98 ans

Service militaire de 1942 à 1946

Médaille service volontaire 39-45

Étoile de guerre 39-45

Étoile France-Allemagne

Médaille Roi VI 39-45

Médaille de la victoire 39-45

Régiment d’ingénierie

 

Jean-Paul Patry – 89 ans

Service militaire de 1950 à 1956

Médaille guerre de Corée 1952

Régiment d’infanterie

De son côté, Albert Pellerin s’est enrôlé en 1942 alors qu’il avait 17 ans. Il a aussi menti sur son âge. Il a fait partie d’un régiment d’ingénieur qui a notamment construit l’aéroport de Dunsfold en Angleterre, et à la construction d’une route de contournement à Leatherhead. À la fin de juin 1944, il traverse la Manche pour les plages de France. «La mort était partout! J’ai vu des affaires que je ne veux pas raconter. C’était une guerre tellement motorisée et technique. Notre mandat était de déminer le terrain de l’aéroport de Carpiquet près de Bayeux.»

On aperçoit devant, J. Marcel Girardeau, Rita Vézina-Willet, Albert Pellerin, et Jean-Paul Patry, accompagnés de membres de la Légion royale canadienne filière 44, Pauline St-Arnaud, le président Robert Trépanier, Dorothy Jean Lupien, et Robert Larivée.

«J’étais dans le péril souvent. À un moment, nos insignes sur la manche de notre habit avaient été changés pour trois boucliers. On savait alors qu’on servait de bouclier humain. Il y avait une première ligne de soldat au front, puis une deuxième, nous on se trouvait en troisième ligne pour protéger l’artillerie.»

Des quatre vétérans rencontrés, Jean-Paul Patry est le seul à s’être enrôlé après la Deuxième Grande Guerre en 1950. «Je voulais voir du pays. La Guerre de Corée s’est déroulée de 1950 à 1953. J’étais dans l’infanterie, et on devait garder nos positions contre la Corée du Nord. Il y avait toujours une pression de ne pas savoir ce qui allait nous arriver. On avait toujours trois Coréens du sud dans chaque section. Je trouvais que les gens là-bas faisaient pitié. C’est effrayant de voir comment un pays pouvait être divisé et se battre en frère et sœur. J’ai aimé ça l’armée, je voulais voir du pays et j’en ai vu.»

Le président de la Légion royale canadienne filière 44 à Shawinigan, Robert Trépanier, exprime la fierté pour la légion de réaliser des activités pour ces vétérans. «Comme dans n’importe quelle profession, quand tu as la passion pour ton travail, tu le fais sans poser de questions. On est chanceux à la filière 44 d’avoir ces quatre vétérans encore vivants. On est fier et ce sont nos modèles! On a 23 vétérans à Shawinigan qui ont participé à des missions, que ce soit des missions de paix ou des conflits. On est choyé de voir autant de vétérans qui ont fait des missions.»