Anna-Maria

CUBA. "Maní maní", que l’on crie sur les places publiques pour vendre des arachides aux passants. Dans les petites rues de quartiers, on crie cebolla, lechuga ou lámpara pour vendre des oignons, de la laitue ou des lampes aux résidants. Anyway, de toute manière, tout le monde crie dans les rues, parce que tout le monde a de la salade à vendre à Cuba.

Anna-Maria ne crie pas. Elle ne fait que se promener au parc Céspedes avec ses cônes de peanuts à la main que tout le monde la remarque. Tous les jours et tous les soirs, elle bosse à vendre ses peanuts.

Quelques vieux poils au visage, des rides plein le corps, édentée, toute menue, elle ne passe pas inaperçue. J’avais connu Anna-Maria l’an passé, une certaine fin de soirée alors que l’un de nous deux était éméché. Je lui avais acheté quelques cônes de peanuts au prix de un peso (0.05$) la pièce.

Mais ce soir, je me rends dans une cafétéria au centre-ville de Santiago-de-Cuba pour y manger un bocadillo jambon-fromage. Surprise!, je retrouve Anna-Maria qui danse au son des musiciens de la place. Et comme c’est souvent le cas en fin de soirée, il n’y a plus rien à manger. Nada.

Heureuse de me revoir, Anna-Maria me prend sous le bras pour m’entraîner dans un autre endroit à proximité où je pourrai manger. Anna-Maria doit connaître Santiago comme le fond de ses cônes de peanuts!

Comme on ne demande pas l’âge à une señora , Anna-Maria doit sûrement faire dans les 75 à 90 ans. Il est facile de lire dans son visage qu’elle a vécu toutes les périodes troubles de l’avant, le pendant et l’après révolution. N’étant pas un pisse-vinaigre, mais plutôt un journaliste d’occasion, je ne l’ai pas davantage cuisiné sur sa situation personnelle.

Sans qu’elle ne me demande quoi que ce soit, je lui offre à manger, mais elle refuse. Je lui offre la moitié de mon sandwich qu’elle accepte. Et aussi un soda à l’orange qu’elle glisse dans son vieux sac de plastique pour amener chez elle. Les yeux rieurs, je soupçonne qu’elle soit dur d’oreille parce qu’elle ne comprend pas tout lorsque je m’exprime en espagnol!

Mais nous comprenons tout de même que nous nous aimons. À la sortie du resto, remerciements, bisous et  étreintes. Bye bye ma jolie, nous nous reverrons sûrement demain… car je mangerai encore de tes maní maní!

Hasta la próxima!

Globetrotteur devant l’éternel, Claude Gill pose cette fois-ci ses valises dans un pays qu’il connait bien: Cuba. Pas de Resort pour le Shawiniganais par contre, le photographe est plutôt du type "chambre en ville". Claude Gill partagera avec nos lecteurs ses cartes postales au cours des prochaines semaines. Bonne lecture.