Au Musée des civilisations par la grande porte

La plus importante exposition jamais consacrée à l’art populaire au Québec accorde une belle place au sculpteur Raymond Massicotte.

Une vingtaine de pièces du résident de Shawinigan se retrouvent au Musée canadien des civilisations à Gatineau, dont son fameux violon sculpté dans un unique bloc de pierre calcaire, une œuvre que le conservateur Jean-François Blanchette décrit comme l’une des plus «étonnantes» de l’exposition. «Disons que je suis fier de faire mon entrée au musée par la grande porte alors que dans mon propre milieu lorsque j’étais actif, je me butais à plusieurs petites portes fermées», témoigne celui qui se définit comme un créateur plutôt qu’un artiste.

Cette reconnaissance survient alors que ce Trifluvien d’origine a cessé toute production depuis qu’il a quitté son atelier à Charette pour déménager à Shawinigan il y a environ deux ans. Les œuvres de Massicotte sélectionnées retracent trois décennies de sculptures, autant de pierre que de bois, la matière sur laquelle il a gossé ses premières pièces à l’âge de 6 ans. À 10 ans, Raymond Massicotte conçoit sa première vraie sculpture: un moine. Par la suite, cet autodidacte apprend divers métiers qui lui permettront de développer sa créativité. Il s’adonnera alors à la sculpture sur bois pendant ses temps libres. C’est ce qui l’a amené à notamment à créer quelques pièces très rafinées qui ont servi lors du tournage de la télésérie Marguerite Volant, à Saint-Paulin, au milieu des années 1990.

Au fil du temps, Raymond Massicotte s’intéresse au fonctionnement de l’univers, ce qui oriente résolument son œuvre qui se veut ésotérique et remplie de symboles populaires comme la navette spatiale, le Titanic, le Triangle des Bermudes, etc.

En 1987, comme un défi personnel, il entre à l’université pour se mesurer à un matériau qu’il n’a jamais travaillé: la pierre. Confronté au scepticisme des gens qu’il côtoit – des artistes et enseignants oeuvrant dans un courant plus moderne que populaire -, sa devise demeurera toujours la même: Rendre l’impossible possible. «Je n’ai jamais appris, mais j’ai toujours su. J’ai toujours su tout ce que je pouvais arriver à faire en prenant un morceau de bois et un canif», raconte ce sculpteur original qui se disait habiter par une énergie sans nom du temps qu’il créait. C’est sans doute ce qui lui a permis d’aller de l’avant alors que sa production était victime de snobisme de la part du milieu artistique régional.

L’exposition Du coq à l’âme comprend 400 pièces retraçant 400 ans de créativité québécoise avec des œuvres anciennes et contemporaines, traditionnelles et indisciplinées. Les œuvres proviennent pour la plupart du Musée canadien des civilisations, qui possède la plus impressionnante collection d’art populaire québécois au monde.

C’est pour illustrer le caractère toujours vivant de cet art au Québec que le conservateur de l’exposition Jean-François Blanchette a choisi de présenter les œuvres de sept artistes contemporains – dont bien sûr Raymond Massicotte – parmi les plus intéressants de l’heure.

Pour le Shawiniganais, cette exposition à Gatineau est peut être le prélude à la reconnaissance de son talent dans son propre patelin et, pourquoi pas, à une exposition rétrospective au Musée québécois de la culture populaire à Trois-Rivières. L’exposition Du coq à l’âme est à l’affiche du Musée canadien des civilisations, à Gatineau, jusqu’au 22 mars 2009.