– COMMENTAIRE – Elle est partie prendre son Bovril

Les jeunes vieux comme moi s’en souviennent.

Le samedi soir, lors de la Soirée du hockey à Radio-Canada, avant que Lionel Duval ne commence son entrevue avec Mario Tremblay à l’entracte ou que René Lecavalier nous décrive les prouesses de Ken Dryden, entre deux commerciaux de Ford et de A&W, il y avait cette fameuse pub de Bovril. Il est parti prendre son Bovril chantait la réclame en parlant d’un joueur de hockey qui avait déserté la glace et ses compagnons de trio pour aller prendre son bouillon de bœuf.

Et bien, je crois que Julie Boulet est aussi allée prendre son Bovril. La campagne électorale a été déclenchée le 5 novembre et deux semaines plus tard, pas de trace de la députée de Laviolette et candidate libérale.

Mais entre vous et moi, elle n’a pas trop à s’inquiéter. Le PQ et l’ADQ ne fondent pas de grands – sinon aucun – espoirs de ce côté.

Le Parti québécois a misé deux fois sur Patrick Lahaie, en 2003 et 2007, pour autant d’échecs retentissants. Jeune homme bien mis de sa personne, le candidat a travaillé dans le passé dans l’entourage de François Gendron et œuvre actuellement au sein du personnel de Pauline Marois. Les militants péquistes de Laviolette espéraient bien l’avoir dans les rangs de nouveau mais il a préféré décliner l’invitation cette fois-ci.

On se doute bien que la chef péquiste n’aimait pas l’idée de céder un membre de son équipe dans un comté perdu à l’avance. Pour le remplacer, Claude Lessard, un militant de longue date, s’avère un bon soldat dans les circonstances.

Du côté de l’ADQ, les stratèges ne sont pas sans savoir que malgré la vague Mario Dumont qui a balayé la Mauricie au printemps 2007, la circonscription de Laviolette est demeurée muette à cet appel. Julie Boulet avait récolté plus de 3200 voix de majorité sur son plus proche poursuivant, le candidat adéquiste Stéphane Defoy. Aujourd’hui, alors que l’ADQ périclite dans les sondages, on a réussi à dénicher un autre valeureux soldat, Éric Tapps. De la chair à canon pour dire vrai.

En fait, le comté de Laviolette n’est pas rouge depuis 2001; pas plus qu’il n’a été bleu entre 1976 et 2001. Voilà une circonscription qui vote pour le candidat plus que le parti.

Durant un quart de siècle, Jean-Pierre Jolivet a régné en monarque. À sa retraite, les libéraux ont misé sur une pharmacienne, somme toute peu connue, mais portant un nom symbolique en Mauricie. D’un naturel avenant, Julie Boulet a tout de suite plu à l’électorat local.

Même ses débuts laborieux comme ministre déléguée à la Santé, en tant qu’adjointe du ministre Philippe Couillard, n’ont pas altéré sa popularité. Sept ans plus tard, elle fait partie de l’équipe rapprochée de Jean Charest, cumulant même depuis le début de l’été deux ministères majeurs: celui des Transports et des Ressources naturelles.

Faut dire que le premier ministre ne l’a jamais lâchée, même lorsque l’opposition exigeait sa démission. Julie Boulet a elle aussi été fidèle à son chef, même lorsque le leadership de celui-ci était contesté dans les rangs libéraux.

Aujourd’hui, la députée de Laviolette en mène large, pas seulement dans Laviolette mais partout en Mauricie. Comment ne pas voir son influence dans le choix de Danielle St-Amand, directrice générale du Festival Western de St-Tite, comme candidate libérale dans Trois-Rivières. Un choix dicté par les relations tendues qu’elle entretenait avec André Gabias, député de Trois-Rivières entre 2003 et 2007. Celui-ci entretenait l’espoir de remettre ça en 2008 mais l’entourage de Julie Boulet a vu à le court-circuiter.

En fait, participer à cinq campagnes électorales en huit ans (défaite en 2000 au fédéral, victoire en 2001 lors d’une élection partielle et réélue en 2003 et 2007), ça forge le caractère et l’expérience. Mais surtout, ça donne soif et pour se désaltérer, rien de mieux qu’un Bovril…