Dossier Nemaska: opinion d’une lectrice

OPINION. 50 citoyens s’expriment contre un projet d’usine de lithium, sur le site de l’ancienne usine Laurentide, car ils sont inquiets pour l’environnement. Ils s’inquiètent de la possibilité de la venue d’industrie lourde, car la ville demande de changer le zonage. Ça fait 120 ans qu’il y a une papetière à cet endroit, c’est vrai. Mais une papetière et de l’industrie lourde, c’est très différent. L’industrie lourde, c’est la chimie, la métallurgie et tous types de transformations minières.

Si le projet Nemaska se fait, avec l’information disponible depuis hier, ça devrait bien aller. Mais si Nemaska ne démarre pas, par manque d’investisseurs, par des retards, par un refus du ministère de l’environnement ou toutes autres raisons, est-ce que la ville va magasiner une autre usine qui sera vraiment lourde cette fois? Les questions posées par ces citoyens sont légitimes. On change le type d’industrie qui pourra opérer à l’avenir.

Et des questions pertinentes comme celle-là, il y en a d’autres. Avez-vous regardé la valeur de Nemaska en bourse, ses actifs sa capacité réelle à mener à terme ce projet. Il n’y a rien de certain. L’obtention de Nemaska est conditionnelle au changement de zonage, mais ne garantit pas Nemaska. Et le changement de zonage, il faudra l’assumer par la suite.

La décontamination aussi soulève des questions. Résolu, en bon citoyen corporatif, se doit de réhabiliter le site, à ses frais et le remettre en état. C’est une obligation légale. Sauf si on change le zonage pour de l’industrie lourde et qu’on y installe Nemaska. À ce moment-là Résolu n’est plus tenu de réhabiliter au complet, il décontamine au minimum et peut vendre le terrain à la ville. Si Nemaska ne se fait pas, qui va payer pour réhabiliter le site quand Résolu ne sera plus propriétaire? C’est la SDS qui doit acheter le terrain avant de le revendre à Nemaska. Si il n’y pas de Nemaska, ou si Nemaska n’a pas les moyens d’acheter le terrain? C’est la ville ou la SDS qui va payer pour décontaminer le terrain qui devait l’être aux frais de Résolu? Savez-vous combien ça coûte?

Le bruit de part et d’autre de la rivière, car pour Nemaska on doit casser de la roche, des tonnes de roches par jour. Et les rejets, les tonnes de roches de rejets par jour une fois l’hydroxyde de lithium extrait, on fait quoi avec ça? On envoie ça où?

Ce qui a été qualifié de «désinformation» était plutôt du manque d’information selon moi. Avant d’apprendre hier que le projet est embryonnaire, qu’ il est loin, loin d’être certain, avant d’apprendre que c’est une nouvelle façon de faire et non la façon classique ultra polluante de traiter le lithium, avant d’apprendre hier que c’est un projet pilote de plusieurs années avant sa réalisation et que l’usine sera conditionnelle à la réussite du projet pilote. Avant d’apprendre aujourd’hui que ce n’est pas 150 emplois mais 120, une fois l’usine construite dans 3-4-5 ans qui seront créés, avant d’apprendre aujourd’hui que le maire Angers a menti en pleine télé lundi en disant que le ministère de l’environnement avait approuvé le projet d’usine Nemaska-lithium alors que c’est faux. Avant-hier, on ne savait rien de Nemaska.

Avant la signature des 50, personne n’avait osé exiger des réponses. Par peur de représailles. Et avec raison quand on voit la façon qu’ont le maire et de nombreux citoyens de traiter ceux qui osent demander des précisions. Les chialeux, ceux qui vivent autour du «trou» c’est bien comme ça qu’ils les appellent. Avec le mouvement populaire soulevé par le maire, avec le «bashing’» de ceux qui réclament de la transparence. Si quelqu’un a encore le courage d’aller signer le registre lundi, il devra avoir un garde du corps, car des manifestants ont promis d’être à l’hôtel de ville pour les accueillir.

Après hier, je me demande qui fait de la désinformation.

Chers défenseurs de Nemaska je vous annonce que c’est quand même grâce à eux, les 50, que toute cette information est devenue disponible hier. Et que sans leur «chialage» même vous, vous ne l’auriez pas su. Je vous annonce également que c’est grâce à eux que plusieurs personnes se sont regroupées. Ils doivent le faire, car les attaques personnelles et l’intimidation qu’ont subis plusieurs d’entre eux avant-hier, hier et aujourd’hui en inquiète plus d’un.

Je ne comprends pas qu’on tombe à bras raccourcis sur des citoyens qui utilisent un processus démocratique pour se faire entendre, alors que le processus sert à ça, mais qu’on accepte que le premier magistrat de la ville discrédite ce même processus en dénonçant son utilisation, qu’il intimide ses opposants et qu’il mente en pleine télé pour gagner son point en prime time à TVA.

Si la tendance se maintient, je m’attends à un «Je suis Nemaska» avant lundi.

Je tiens à remercier Nancy Déziel qui a passé beaucoup de temps hier à expliquer calmement et avec grand respect et beaucoup de passion ce projet. Ses explications ont rassuré sur de nombreux points les citoyens inquiets. Mais elle ne peut pas tout faire. Les questions restantes doivent pouvoir être débattues. Et non pas être bafouées. Et c’est Monsieur Angers qui doit faire ce bout-là s’il veut être appuyé.

Mais la vraie question que je me pose (et cette question s’applique à plusieurs dossiers à Shawinigan): pourquoi c’est ceux qui posent les questions qui dérangent? Pourquoi ce ne sont pas ceux qui refusent d’y répondre?

Catherine Durocher

Grand-Mère