Gaëtan Bégin: confident des porteurs de lumière

Curieux comme cet homme qui côtoie quotidiennement des hommes et des femmes en fin de vie arrive à conserver le sourire, et à éveiller le nôtre, en parlant de ses expériences.

Gaëtan Bégin est médecin mais les proches des mourants qu’il accompagne le considèrent avant tout comme un ami de la famille. Responsable de l’unité de soins palliatifs de l’Hôpital du Centre-de-la-Mauricie depuis 1989, le nom du Dr Bégin est souvent évoqué dans les notices nécrologiques alors que des remerciements lui sont adressés. «Ça demande une approche particulière, admet-il humblement. Dans la mentalité des gens et même pour plusieurs de mes collègues, un médecin est là pour guérir le monde alors que moi, je ne fais que soulager leur souffrance.»

Souffrance physique bien sûr mais également psychologique, spirituelle et sociale ajoute-t-il. «Mon approche avec les gens en fin de vie, c’est de leur donner le meilleur confort possible, de leur accorder la meilleure qualité de vie. On y arrive en leur posant des questions, en jasant avec eux et en les respectant. Je suis là pour les accompagner dans leur cheminement personnel.»

Le secret: l’humour

Mais comment arrive-t-on à côtoyer la mort de si près et sur une aussi longue période sans en être affecté, sans vouloir réorienter sa pratique: «L’humour, répond-t-il du tac au tac. Parce que rire, même pour un mourant, constitue l’un des seuls moments où il se sent encore vivant.»

Le Dr Bégin rappelle en souriant que lorsque la direction de l’hôpital lui avait confié l’unité de soins palliatifs, il avait émis cette seule condition: intégrer l’humour dans la pratique quotidienne. «Je me suis fait regarder d’une curieuse de façon mais aujourd’hui, je peux vous dire que c’est une philosophie qui est assimilée par le personnel infirmier et les bénévoles d’Albatros et indirectement, le patient et sa famille embarquent aussi là-dedans.»

Le résident de Saint-Élie-de-Caxton ajoute également qu’il est important de ne pas faire sienne la souffrance du patient, quelle que soit son intensité. «Leur douleur ne m’appartient pas. Je suis empathique à leur état mais pas sympathique. C’est essentiel de conserver cette distance sinon, c’est certain que je ne pourrais pas continuer.»

Les porteurs de vie

Pour l’omnipraticien, la réticence de plusieurs à aller visiter un ami ou un parent en phase terminale est provoquée par la confrontation de l’éventualité de sa propre mort. En revanche, le Dr Bégin souligne que ses «porteurs de lumière» – c’est ainsi qu’il désigne les mourants qu’il accompagne – ont souvent plus besoin que jamais de la présence de leurs proches. «À cette étape de leur existence, ils ont besoin des choses les plus simples: se faire écouter, se faire regarder, se faire sourire, se faire toucher. Il faut revenir à l’essentiel, vivre l’instant présent et ne pas embarquer dans les concepts compliqués.»

Humble devant les compliments qui lui sont adressés pour son approche humanisme, le médecin natif de Québec répond plutôt par l’enrichissement personnel qu’il retire de ses expériences. Le Dr Bégin raconte ainsi cette anecdote à propos d’un médecin qui tentait de déterminer l’espérance de vie d’une patiente. «Le temps qu’il me reste à vivre, et bien, c’est le temps qu’il me reste à vivre lui a-t-elle répondu. À ceux qui veulent absolument mettre une date, je me sers maintenant de la sagesse de cette dame», conclu le médecin. Le Dr Gaëtan Bégin prononcera une conférence le jeudi 13 mars à 19h au Pavillon de la culture de Saint-Boniface situé au 155, rue Langevin.