Le concert

Par Marilou Hamel-Fréchette

CHRONIQUE. L’école de mes enfants présente toujours un concert de Noël. Tous les ans, l’avant-spectacle à la maison se passe à peu près ainsi.

Mini B, le plus grand, se traîne les pieds pour se préparer et répond toujours à mon exaspération de la même façon:

Moi: Peux-tu te dépêcher un petit peu s’il te plaît? Et avoir l’air un peu plus content?

Mini B (en boxer, les cheveux en bataille alors que tout le monde est prêt) : Je me dépêche maman.

Moi: Ok, merci de l’effort… Dépêche-toi à la prochaine vitesse d’accord? Qu’est-ce qui t’embête? T’es stressé?

Mini B (air nonchalant habituel): Stressé de quoi?

Moi: Ben, du spectacle.

Mini B: Euh, non, j’suis pas stressé.

La bonne nouvelle: cet enfant ne mourra jamais d’une crise de coeur.

Mister Ma, le plus petit, ne contenant pas son excitation, devient comme un spring survolté, sautant dans les airs un instant, chantant des notes suraiguës qui font pleurer le chien, glissant sur le plancher la seconde d’après (pendant que je gaspille ma salive avec un dixième «tu vas t’salirrrr!»), tentant le vol plané sur le divan, finissant toujours par requérir un Ice Pack d’urgence dans le front.

Moi: Calme-toi un peu, svp, tu veux?

Mister Ma (en sautillant avec son glaçon): Je suis calme! Calme-calme-calme-calme-callllmeeeeee!

 

Fay étant Fay, en est habituellement à réviser mentalement le plan de la soirée, ses responsabilités, inspecter sa flûte, nous informer d’une discorde dans l’orchestre de cordes (ha!ha!, jeu de mots) et à faire ses recommandations d’usage:

Fay: Maman, as-tu les billets?

Moi: Oui, dans mon sac.

Fay: N’arrivez pas en retard hein? Je joue du violoncelle au début. C’est à 7 heures. Papa est-ce qu’il est prêt?

Je l’adore, dans tout son sérieux, avec sa belle boucle rouge dans les cheveux, tradition depuis la maternelle, quand un ami qu’elle aimait beaucoup, s’était exclamé à sa mère en la voyant:

«Fay est comme un cadeau!» Depuis ce temps, tous les ans, elle part pour le concert avec son ruban écarlate.

 

Cette année était spéciale, parce que c’était la dernière fois que les trois participaient ensemble, le plus vieux quittant pour le secondaire l’an prochain.

Il y a eu, au cours des ans, des moments étonnants, de douloureux numéros de flûte à bec (ah! la flûte! instrument si harmonieux, surtout quand il est joué par des enfants de maternelle), des chansons émouvantes, mais toujours, avouons-le, ce but premier d’apercevoir, au milieu des enfants, les petites bettes de notre progéniture et de fondre de bonheur dès leur première note, fausse ou pas.

Chaque année, nous rigolons de voir Mini B qui articule tellement en chantant qu’on pourrait lire sur ses lèvres de la centième rangée. Fay, qui est partout, connaissant toutes ses chansons, celles de ses frères et du huitième voisin. Mister Ma, si blagueur dans la vie, si sérieux sur scène, se tenant droit comme un piquet, fier comme s’il chantait pour une assemblée de dignitaires.

C’est là, sur scène, qu’on voit à quel point ils ont grandi, qu’on sent la fébrilité des vacances imminentes et de la nouvelle année qui se pointe, remplie de promesses et de nouveaux défis.

Bonne année à tous!