Les Cataractes sous enquête

«Construire un amphithéâtre avec l’argent du public, et remplir les poches de l’entreprise privée. L’histoire se passe à Shawinigan, mais elle pourrait se passer n’importe où au Québec.»

La vidéo promotionnelle de l’émission Enquête, diffusée sur les ondes de Radio-Canada jeudi dernier, laissait présager des révélations chocs à propos de la façon dont des fonds publics ont été dépensés pour qu’en bout de ligne ce soit une organisation de hockey, sans but lucratif, qui empoche les profits.

La construction de l’amphithéâtre municipal, pilotée par l’ancienne administration Landry, est une saga digne de la construction des installations olympiques de Montréal. Dès l’annonce de ce projet pharaonique, l’organisation des Cataractes est impliquée dans le processus décisionnel concernant l’infrastructure.

La Ville tient mordicus à procéder à la construction d’une glace à dimension olympique. Une option que la direction des Cataractes rejette du revers de la main, allant jusqu’à affirmer que c’est une question de vie ou de mort pour l’équipe. Ainsi commencent des jeux de coulisses et des négociations entre le Conseil municipal et l’équipe de hockey.

Malgré les dépassements de coûts successifs et les nombreuses modifications apportées aux plans initiaux, la Ville se rend aux arguments des Cataractes en acceptant un compromis : celui des bandes rétractables. Le tout moyennant la jolie somme de 250 000$. Dès lors, de toute évidence, on constate que la direction des Cataractes possède de bons contacts à l’hôtel de ville. Elle n’a qu’à demander ce qu’elle veut pour ensuite l’obtenir.

Le pacte est scellé entre les parties : la Ville et les contribuables seraient aux services des nouveaux dirigeants des Cataractes, désignés comme les sauveurs de la plus vieille concession de la Ligue de hockey junior majeur du Québec.

D’ailleurs, la direction des Cataractes a la réputation d’être très exigeante envers les employés municipaux qui travaillent au Centre Bionest et à agir sans ménagement pour qu’on réponde prestement à leurs requêtes de toutes sortes.

Depuis l’arrivée des Cataractes dans le nouvel amphithéâtre, en décembre 2008, il est évident que l’organisation engrange de très gros bénéfices puisqu’elle ramasse tous les revenus provenant, entre autres, des concessions. Cet aspect de l’entente avec la Ville était connu. Là où le bât blesse, c’est qu’on dévoile que derrière l’organisme sans but lucratif se cache une entreprise privée où les membres du conseil d’administration retirent des bénéfices.

Je suis un amateur de hockey et un fidèle partisan des Cataractes mais, avant tout, un simple citoyen qui paie des taxes et qui contribue pour le palais de glace que l’administration Landry a fait construire pour les Cataractes. Initialement, j’étais en faveur du projet annoncé à 14 millions $, jugeant que la mise à niveau du vétuste aréna Jacques-Plante, même à un coût moindre, ne valait pas la peine.

J’ai rapidement déchanté lorsque je me suis rendu compte qu’on avait menti à la population et que le projet était mené par des incompétents, ce qui a fait en sorte que la facture a gonflé jusqu’à 28 millions $.

À l’aube de l’inauguration du nouvel amphithéâtre, je m’étais posé cette question : irais-je m’asseoir dans cet aréna pour encourager mon équipe? J’en vins à la conclusion que je n’étais pas pour boycotter mon équipe de hockey parce que des incapables de la Ville avaient fait de l’amphithéâtre municipal un véritable gouffre financier.

Le reportage de l’émission Enquête me laisse perplexe et suspicieux. Il y a des limites à me faire exploiter en tant que payeur de taxes. Ma décision est prise : tant que la Ville aura une relation d’affaires déficitaire avec les Cataractes et qu’elle continuera à se mettre à genoux devant cette organisation de hockey, je ne renouvellerai pas mon abonnement pour mes billets de saison et je ne remettrai plus les pieds au Centre Bionest pour assister à un match des Cataractes, une équipe qui devrait plutôt porter le nom de Requins, de Sangsues ou de Cancrelats de Shawinigan, à l’image du maire qui s’est défilé devant les questions du journalistes lorsque les lumières des caméras se sont braquées sur lui.

– Renaud Gauthier.

Shawinigan