Plongeon dans le quotidien d’un enfant autiste

Expressive rouquine de 11 ans, Jennifer est volubile et allumée. Cela prend un petit moment avant de réaliser que son comportement a quelque chose… d’inhabituel. Cet élément, c’est un trouble envahissant du développement (TED) non spécifique. Plus concrètement, Jennifer possède des symptômes reliés au TED de l’autisme et au syndrome d’Asperger. L’Hebdo a fait incursion dans son quotidien pour le mois de l’autisme.

Le Jour de la marmotte

La fillette a reçu ce diagnostic en 2009. Patience, ouverture d’esprit, flexibilité et amour, voilà donc les qualificatifs qui rendent la relation entre Manon Desaulniers et sa fille Jennifer plus facile. «Jennifer est très intelligente. Elle a de bonnes notes à l’école et tout. Ce sont plus les relations avec les autres qui posent problème. Elle n’a pas beaucoup d’amis et elle vit dans son monde», indique la mère qui ajoute que le manque de dextérité est aussi une des lacunes de l’enfant.

En plein mois de l’autisme, cette maladie particulière est encore méconnue du public et trop souvent confondue avec un manque de savoir-vivre, selon la mère. «J’ai élevé Jennifer comme mes autres enfants. Je lui ai donné des règles de savoir-vivre, des balises et des encouragements» Le hic, c’est que Jennifer accuse un retard en termes d’interaction sociale et requiert une routine quotidienne qui doit être respectée à la lettre.

Aussi mère de Kim (25 ans) et Julie (23 ans), la dame souligne que les trois sœurs se sont toujours soutenus. Cependant, avec Jennifer «c’est tous les jours comme dans le film Le jour de la marmotte, où l’on doit recommencer les mêmes actions dans le même ordre!». Manon Desaulniers a donc choisi d’être une mère au foyer.

«L’autiste devient l’adulte qu’on lui montre à devenir»

«Avec une enfant autiste, tu ne peux pas omettre de te présenter pour aller la chercher à l’école. Ce serait terrible comme répercussion pour elle. Encore là, tu ne peux pas dire que tu feras telle activité si tu n’es pas sûre de la faire réellement», fait remarquer Mme Desaulniers qui parle alors d’une enfant susceptible de se livrer à de l’automutilation pour manifester son désarroi.

«Par contre, ma fille n’a jamais piqué de colère. Elle n’est pas de ce genre-là, elle aime tout le monde. Même qu’elle a de la difficulté à rapporter des incidents qui se déroulent à l’école parfois». Il faut alors que la mère questionne sa fille et veille à ce que tout se déroule le plus normalement possible pour son rejeton. «Je n’oublierai jamais ce que ma nièce orthopédagogue m’a dit un jour quand je m’interrogeais sur l’avenir avec ma fille: Jennifer va être l’adulte que tu vas lui montrer à devenir.»

Justement pour favoriser ses interactions avec les autres, la famille possède depuis l’été dernier un chien MIRA. Effel, une femelle labrador qui aura bientôt un an, a su intégrer le clan Desaulniers. «Effel permet à Jennifer de s’exprimer sur le comportement et les prouesses de son chien aux autres jeunes», note la mère.

Cuisine & équitation

Entourée de spécialistes du CLSC comme Annie Desrochers, du Centre de réadaptation en déficience intellectuelle (CRDITED) comme Alexandra Bernier et de Marie-Josée Dufresne, éducatrice spécialisée, Mme Desaulniers parvient à donner un environnement des plus ordinaires à Jennifer au jour le jour. La jeune fille est ainsi en cinquième année. Elle suit son parcours scolaire dans une classe régulière à l’école Saint-Joseph et participe à des loisirs variés comme n’importe quelle fillette de 11 ans.

«C’est certain que le dialogue est la clé. Je lui propose des choses, car elle ne ferait que de l’ordinateur et du dessin tout le temps si on l’écoutait», sourit la mère. «Ah les dessins!» Ils sont la récompense de la fillette qui termine souvent ses exercices la première en classe et qui est championne de la dictée P.G.L à son école.

«Lorsqu’elle a rempli ses choses correctement, Jennifer fait ses bandes dessinées tranquillement en classe. Elle en rapporte des tonnes ici. «Je me suis entendue avec la professeure pour qu’elle puisse dessiner, mais uniquement si elle avait fait ses devoirs avant. Elle est plus rapide que les autres, donc elle dessine souvent».

Grâce aux encouragements de Mme Desaulniers, la fillette suit désormais des cours de natation, de cuisine et aussi d’équitation, un sport qu’elle affectionne. «Au départ, ce n’est pas évident d’intégrer un élément nouveau ou de déroger des habitudes chez une TED.» Souvent, Jennifer va avoir des répercussions physiques de ces bouleversements, comme ce fut le cas lors de son déménagement de Trois-Rivières à Shawinigan ou au début d’un nouveau passe-temps.

«Par contre, il faut se rappeler que Jennifer à l’âge mental d’un enfant de huit ans environ. Elle a aussi ses habitudes et il ne faut pas en déroger. Je ne pousse jamais pour la faire faire quelque chose, car ça serait juste pire». Alors, si la fillette se lève un matin et qu’elle n’a pas envie d’aller à l’un de ses cours, la mère n’insiste pas et passe à autre appel. «Ajustement, est le mot d’ordre!». Jennifer prend aussi part à une rencontre avec un groupe de jeunes TED une fois par semaine.

Jamais sans mon Petshop

On ne pourrait pas parler de la jeune Jennifer sans parler de son impressionnante collection de jouets Petshop. Les Petshop sont des petits animaux qui varient en grandeur et couleur. La fillette de 11 ans en possède des centaines qui tapissent sa chambre et sa salle de jeux qui rendrait jalouse n’importe quelle enfant de son âge.

«Ses Petshop, Jennifer les traîne partout. Elle a vraiment un intérêt pour ce jouet!» Aux dires de la rouquine, le jouet prenant la forme d’une pieuvre serait l’un de ses préférés. L’étonnement se lisait d’ailleurs sur son visage expressif lorsque la petite a constaté que le journal ne connaissait pas l’existence de ce jouet «parfait»