Le goût d’un pays: le temps des sucres
Dans Le goût d’un pays, le réalisateur Francis Legault part de la prémisse de la fabrication du sirop d’érable pour dresser un portrait de l’identité des Québécois, de leur histoire, de leur lien au territoire, de leur économie et des valeurs qui leur sont propres.
«Je sais que le film est presque subversif, remarque le cinéaste. Parce que ce n’est pas cynique, que ça ne chiale pas, que c’est lent et que ça essaie de mettre l’accent sur les belles choses plutôt que sur ce qui cloche.» Et c’est aussi ce qui rend l’ensemble si savoureux.
«Je trouve qu’il y a quelque chose de beau dans l’expression “le temps des sucres”. C’est comme “le temps des lilas” ou “le temps des fraises”», confie Francis Legault.
Cette poésie, cette attention, on la trouve partout dans Le goût d’un pays. Un documentaire dans lequel le réalisateur sublime le rituel de l’érable, faisant briller l’hiver, ressortant les plus beaux aspects de la culture d’ici et présentant une multitude de chaleureux personnages vêtus de leurs plus jolis pulls, manteaux et salopettes. Comme ce propriétaire dont les yeux se remplissent encore d’eau au souvenir du verglas et de son érablière ravagée à l’époque. Ou cette charmante famille du Mile-End dont le rêve était d’avoir une cabane – et qui l’a réalisé.
Entre leurs interventions senties, joyeuses, émues, le cinéaste place une discussion riche et imagée entre Gilles Vigneault et Fred Pellerin. Qui discutent notamment de la langue. «C’est clair qu’une phrase juste avec des “ostis” et des “tabarnak”, ça brise un peu la clarté du message. Mais il y a des “ostis” et des “tabarnak” qui sont des véhicules pour des émotions. Ce n’est pas une pauvreté de langage, c’est une grandeur de sentiments», lance notamment Pellerin.
Entre ces remarques imagées, d’autres personnalités offrent leur point de vue: Kim Thuy, Boucar Diouf, Fabien Cloutier, Martin Picard… Un grand party.
Du reste, c’est ce que Francis Legault voulait faire avec ce film qui a remporté le prix du public aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal «un portrait de famille». Une «empreinte d’aujourd’hui». «Si, dans 50 ans, les gens disent que personne ne se préoccupait de la langue, de la culture et du rituel des sucres au Québec, il y aura une preuve qu’il y en avait à qui ça tenait encore à cœur.»
Source: Natalia Wysocka / Métro