Claude Gill : Rapa Nui
CHILI. Belle dizaine à Santiago-de-Chili, il y a tant à visiter ici… et comme le chante Isabelle Pierre, le temps est bon! Tellement bon que j’ai eu une illumination, celle de me rendre à Rapa Nui ou l’Île de Pâques en langage connu.
Territoire chilien, île mythique et mystérieuse, m’est venu la folle idée d’aller piétiner cette terre silencieuse et loin de tout trempant dans l’océan Pacifique. Danser sur les volcans et saluer les Moaï, ces statues monumentales qui ne laissent personne indifférent… Seulement quatre heures et quelques minutes de vol de Santiago-de-Chili.
Petite île égarée dans l’océan Pacifique, ayant la forme d’un triangle faisant 23 kilomètres sur la longueur et ne dépassant pas 12 kilomètres de largeur, je me suis flagellé pour croire que j’y étais! De l’aéroport, minuscule comme une boîte d’allumettes, je me suis facilement rendu à mon hôtel dans un temps de douze minutes… à la marche avec mon baluchon sur le dos!
Après les explications d’usage, je demande à Ita, le sympathique proprio de l’hôtel, les clés d’entrée de la propriété et de la chambre. Pas de clé ici, mais il m’avise de mettre le crochet à la porte donnant sur la rue pour éviter les visites indésirables de chiens et de chevaux. Ayant vu trois chiens fous (sont tous fous), poursuivre un jeune cheval sur un trottoir du peut-on dire centre-ville de Hanga Roa en lui mordillant la queue et en aboyant, je ne voudrais pas revivre cette tragédie dans le jardin intérieur de mon hôtel…
Capitale de la commune de l’Île de Pâques, Hanga Roa, petite ville de quelques rues avec un parc automobile vieillot et comptant 4,001 habitants depuis que j’y suis, respire le charme. Et ils sont 7,750 à respirer sur l’entièreté de l’île. Oui il y a bien une large population de microscopiques fourmis qui travaillent en journée et des tribus de grosses cucarachas qui chantent la nuit venue,mais on ne s’en formalise pas… je danse maintenant!
Des fleurs, des fleurs, des fleurs qui poussent partout. Les fleurs se poussent tellement partout que les dames ont souvent de jolies coiffures ornées de fleurs naturelles. Et que dire de ces beaux cafés, restos et bars en bordure du Pacifique! C’est comment dire? Un peu, un peu beaucoup, paradisiaque!
Mais je ne suis pas venu ici pour passer mon temps entre cafés et bars ou pour entendre les chiens et les coqs qui ne cessent de me chanter de l’opéra en duo. Je suis venu ici pour m’imprégner des mystérieuses histoires de cette île, jaser avec les Moaï et lire le rongorongo, cette écriture océanienne unique. Cinq jours ici dont deux belles journées à visiter l’île en compagnie de Lewis, chauffeur et guide qui connaît toutes les grosses statues comme s’il avait déjà pris une bière avec chacune d’entre elles.
Un coup de pied à droite, un coup de pied à gauche, il en sort des statues de Moaï à gauche et à droite! Debout pour celles qui ont été redressées, au sol sur le dos ou le nez dans l’herbe pour celles encore couchées, en pièces détachées pour les moins chanceuses, vraiment impressionnant comme lieu… ça change pas une vie… mais ça l’agrémente!
Et ensuite, encore une visite, je me suis rendu au village Orongo et au cratère du volcan Ranu Kau. Sept kilomètres de marche pour s’y rendre, soleil de plomb, faisait très chaud… j’ai essayé l’auto-stop. À l’aller comme au retour, la première voiture qui s’est pointée m’a prise à son bord. Je n’ai pas d’égoportrait à poster pour vous épater sur les réseaux sociaux… mais je raconterai jusqu’à mon dernier souffle que j’ai fait du pouce sur l’Île de Pâques!
Et avant de jaser avec les Moaï, je voulais avoir belle allure pour notre éventuelle rencontre. Ma vieille barbe blanche en friche depuis trois semaines, je me cherchais un barbier à Santiago. Je débarque du métro à la station Plaza de Armas que je trouve une jeune barbière avec de longs cheveux bouclés teints en blond et qui rase les poilus à juste prix. Le salon Lady Di!
Ok, je m’assois dans sa chaise, cheveux et barbe por favor que je lui demande. Elle réussit facilement à me piquer les oreilles à trois ou quatre reprises avec son rasoir électrique qui vibre comme un moteur deux temps. Ayoye en français, en anglais ou en espagnol qu’elle me comprend, et elle s’en excuse. Elle n’avait pas encore sorti sa lame pour me faire la barbe…
Pas d’appuie-tête, elle m’asperge le visage d’eau froide pour faire glisser la lame. Dites donc, z’auriez pas de la crème à raser? Non, j’utilise de l’eau qu’elle me répond. Avec la lame sous mon cou… je ne l’ai pas argumenté. Puitch, puitch, encore un peu d’eau froide au visage pour me faire taire davantage. Elle termine sa merveilleuse job en m’aspergeant d’un non moins merveilleux parfum à faire fuir les insectes. Tellement mal rasé que j’ai sorti mon Bic de plastique rendu à l’hôtel… reprendre sa job!
Quoi, qu’est-ce vous dites? Maintenant deux semaines que j’ai l’oreille droite bouchée. L’altitude dans les Andes, le rhume suite à des changements de climat, les vols d’avions… je ne sais pas! Quoi, qu’est-ce vous dites???¡Hasta la próxima!