Culture Shawinigan : déficit cumulé estimé à 1,520 M$

SHAWINIGAN.  La Ville de Shawinigan a dévoilé aux médias le rapport final de l’analyse de gestion financière et de gouvernance et plan de redressement de Culture Shawinigan réalisé par la firme Raymond Chabot Grant Thornton. Le document de 59 pages dévoile plusieurs lacunes dans la gestion. On y apprend notamment que le déficit cumulé estimé est de 1 520 906 M$.

Pour en arriver au montant de 1,520 M$, on additionne les résultats non audités au 31 décembre 2023 (1 043 231$), le déficit cumulé en 2022 (61 475$), et le redressement des dépenses de l’Entente de développement culturel (416 200$).

Voici certains faits saillants du rapport émis par la firme.

« Selon les rencontres réalisées, la pratique démontre que Culture Shawinigan travaillait directement avec la direction générale de la Ville ou la mairie pour les dossiers majeurs », peut-on lire.

Selon les bonnes pratiques de gouvernance, il n’est pas souhaitable que des élus municipaux siègent à des conseils d’administration (CA) d’organismes mandataires ou financés par la ville considérant les normes liées à l’indépendance des administrateurs.  Une meilleure pratique de gouvernance aurait été de désigner un fonctionnaire comme membre observateur et une pratique de gouvernance optimale aurait plutôt été que le conseil municipal nomme un citoyen administrateur externe et indépendant plutôt qu’un élu observateur.

Le ministère de la Culture et des Communications (MCC) a soulevé de nombreuses inquiétudes sur la qualité de la gestion de l’entente. En effet, 320 000$ en dépenses effectuées de 2021 à 2023 (par Culture Shawinigan comme mandataire de la Ville) sont considérés comme non admissibles par le MCC. 

Informations incohérentes véhiculées par Culture Shawinigan à la Ville, au MCC et à d’autres bailleurs de fonds: Il y a eu des incohérences sur les subventions demandées, reçues et l’information véhiculée. Les montants demandés aux différents bailleurs de fonds pour un même projet semblent avoir été différents d’un formulaire de demande à l’autre. Cette mauvaise pratique peut être utilisée pour aller chercher davantage de subventions. 

L’ancien directeur général (DG) Bryan Perreault

Cinq pages du rapport sont consacrées directement sur le travail de Bryan Perreault. 

On apprend notamment que dans le contrat du DG, il n’avait pas le pouvoir de négocier des contrats de plus de 30 000$ et des achats de plus de 30 000$ en multiples factures ont été observés par des personnes rencontrées.

Les prévisions budgétaires étaient peu élaborées sans documentation détaillée des hypothèses ou d’analyses sur une base de scénario. La soumission au CA de budgets de projets spécifiques était rarement finalisée.

Certaines embauches de personnel auraient été faites sans l’approbation préalable du CA.

Le DG avait signé son dernier contrat d’embauche le 18 juillet 2023 pour 3 ans.

« La majorité des personnes rencontrées ont mentionné que le DG en poste était un leader visionnaire (un gestionnaire décrit comme confiant, expérimenté, de grande notoriété, habile communicateur, avec une bonne capacité de travail et de valorisation de ses succès). Dans la littérature, cette approche du leadership charismatique montre souvent un leader individuel, situé au sommet de la hiérarchie. Les dangers de cette approche sont l’idéalisation du leader, mais aussi les dérives dans le comportement. Leur vision peut devenir une obsession et ces leaders peuvent se montrer au jour le jour de plus en plus autoritaires et arrogants, notamment envers les employés », peut-on lire.

Les constats  

La firme fait état de quatre constats majeurs dans son rapport.

1.Une entente de gestion qui manque de précision

Aucune condition liée à la vie démocratique de la Corporation n’a été indiquée dans l’entente, or la Ville a été présente à la fondation de la Corporation et active sur le conseil d’administration jusqu’à tout récemment.

2. Des pratiques de gouvernance non appropriées

Les membres du CA ont été recrutés en fonction de leur provenance plutôt que par expertise. Cela a limité l’efficacité du CA.

La Ville a été très présente sur le CA par des élus ayant droit de vote. Cela a affecté l’impartialité et l’indépendance des décisions.

3. Une mauvaise gestion des ententes

Il y a peu eu de suivi entre Culture Shawinigan, la Ville et le MCC dans la gestion de l’entente. De nombreux changements ont été apportés par Culture Shawinigan sans aucune approbation demandée au MCC.

4. Une direction ne maîtrisant pas la gestion financière et de projets

La direction ne maîtrisait pas les éléments de base en termes de gestion financière et de projets.

Analyse financière

Les résultats 2019-2023 permettent d’établir une tendance déficitaire dans les cinq dernières années. Un déficit de près de 600 000$ est observé en 2019 puis un autre de 500 000$ en 2022 et finalement un déficit de 1 M$ en 2023. Dans tous les cas, des déficits sont observés sur plusieurs activités dans l’organisation. Le déficit cumulé pour 2023 devrait être de 1 M$.

Des revenus Covid ont été reçus de 2020 à 2022 totalisant près de 1,3M$. Ces revenus dédiés à soutenir les organisations dans le cadre du ralentissement des activités ont permis à Culture Shawinigan d’accéder à des liquidités supplémentaires, occultant potentiellement une tendance déficitaire.

Entre 2019 et 2023, les revenus ont augmenté de 21% et les dépenses de 31%. À l’exception de 2020, une croissance des dépenses constante et plus rapide que les revenus est observée.  

Recommandations

1.Revoir l’entente de gestion entre la Ville et la Corporation

2.Modifier la gouvernance de la Corporation (ex. : retirer les élus municipaux du CA)

3.Encadrer la direction dans ses fonctions

Culture Shawinigan perçoit certains revenus en avance tels que les revenus de billetterie et de subvention. Or, en 2023, tous les revenus qu’elle a reçus pour des services qu’elle devait livrer en 2024 ont été dépensés pour les activités courantes de 2023. Les versements que la Ville pourrait effectuer pour éponger le déficit sont donc supplémentaires aux subventions 2024.

Il est possible de consulter le rapport complet en cliquant ici.