Demande d’injonction pour démanteler le blocus autochtone d’un dépotoir au Manitoba

WINNIPEG — L’audience sur une injonction pour mettre fin au blocus d’un dépotoir de Winnipeg a été ajournée jusqu’à vendredi.

Plus tôt jeudi, l’avocate représentant certains des manifestants a plaidé que ses clients avaient le droit de protester contre la violence systémique et continue envers les femmes et les filles autochtones au Canada, «en particulier au Manitoba».

Jeremy Skibicki a été accusé de meurtre au premier degré dans la mort de quatre femmes. On pense que les restes de Morgan Harris et de Marcedes Myran se trouvent à la décharge privée de «Prairie Green».

Skibicki a également été accusé relativement à la mort de Rebecca Contois, dont les restes ont été retrouvés l’année dernière au dépotoir «Brady Road», et d’une femme non identifiée que les dirigeants autochtones appellent «Buffalo Woman», dont les restes n’ont jamais été retrouvés.

Des dizaines de manifestants bloquent la route principale qui mène au dépotoir «Brady Road», exigeant des fouilles dans l’autre décharge, «Prairie Green», au nord de Winnipeg.

La Ville de Winnipeg a déposé mardi une requête en injonction auprès de la Cour du Banc du Roi pour exiger le départ des manifestants, invoquant des enjeux de sécurité, d’environnement et de finances publiques.

L’avocate Sacha Paul représente Cambria Harris, la fille de l’une des femmes dont le corps pourrait se trouver dans la décharge «Prairie Green», ainsi que d’autres personnes impliquées dans le blocus.

Me Paul a déclaré au tribunal jeudi qu’il n’y avait pas urgence à émettre une injonction, car une route alternative vers la décharge a été ouverte. La Ville soutient que cette route alternative ne peut pas accueillir un grand nombre de camions lourds.

Le blocus a commencé la semaine dernière, lorsque la première ministre du Manitoba, Heather Stefanson, a annoncé que son gouvernement ne soutiendrait pas une fouille dans le dépotoir «Prairie Green». Elle invoquait une étude qui estime que ces fouilles pourraient coûter 184 millions $ et poser des risques pour la sécurité, sans aucune garantie de succès.

«Sans cœur», dit le ministre Miller

Le ministre fédéral des Relations Couronne-Autochtones, Marc Miller, a qualifié de «sans coeur» la décision du Manitoba. Il a estimé que cette annonce rendait «impossible sur le plan logistique» de prendre une décision sur les fouilles cet été.

Le ministre fédéral a continué jeudi de condamner la position de la première ministre Stefanson. Alors qu’il s’adressait aux familles de femmes autochtones disparues et assassinées au Manitoba, il a déclaré que le gouvernement manitobain se dérobait à ses responsabilités financières et à ses champs de compétence.

«Notre frustration vient du fait que nos responsables ne savent pas comment s’engager en ce moment parce qu’apparemment, la porte est fermée sur une fouille et même les responsables provinciaux ne savent pas quel est le message que la première ministre leur a donné», a estimé M. Miller dans une visioconférence avec les familles.

Pendant ce temps, les chefs autochtones du Manitoba ont présenté jeudi une résolution d’urgence à l’assemblée générale de l’Assemblée des Premières Nations, à Halifax, demandant au gouvernement fédéral de financer les fouilles. 

La grande cheffe Cathy Merrick, de l’Assemblée des chefs du Manitoba, a déclaré jeudi que l’organisme souhaitait voir un engagement à financer les recherches d’ici la fin juillet.

«Parce que l’étude de faisabilité a été commandée par le gouvernement fédéral, ils devraient au moins assumer cette responsabilité pour s’assurer qu’elle est réalisée malgré (…) l’absence de la province à la table pour le moment», a déclaré la cheffe Merrick.

Quelqu’un doit reprendre les rênes et s’assurer que le travail est fait, sinon on envoie le message qu’il est tout à fait acceptable et normal au Canada «de trouver des femmes autochtones dans les dépotoirs», a estimé Mme Merrick.

Le débat sur d’éventuelles fouilles a accru les tensions dans la capitale manitobaine. La police a été appelée mercredi après qu’une cinquantaine de personnes se soient rendues au domicile d’un homme qui aurait jeté de la terre sur une peinture murale sur les lieux du blocus.