L’Alberta nuit aux négociations avec Washington, juge l’ancien négociateur d’Ottawa
OTTAWA — L’ancien négociateur commercial en chef d’Ottawa, Steve Verheul, estime que l’Alberta sape les tentatives du Canada d’empêcher les États-Unis d’imposer des tarifs dommageables — une mesure qui, selon le président américain Donald Trump, pourrait conduire le Canada au statut d’État en faillite.
Le premier ministre Justin Trudeau a rallié la plupart des premiers ministres pour convenir que tous les secteurs de l’économie canadienne pourraient être déployés dans la lutte contre le plan du président américain Donald Trump d’imposer des tarifs de 25% sur les importations en provenance du Canada.
La première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, a pour sa part déclaré que le Canada ne devrait pas menacer les États-Unis de tarifs de rétorsion ou de réduction d’exportations d’énergie, et devrait plutôt se concentrer sur la recherche d’un terrain d’entente.
Plus tôt cette semaine, M. Verheul a attribué la renégociation réussie de l’ALENA par le Canada lors de la première administration Trump — qui a abouti à l’Accord Canada-États-Unis-Mexique (ACEUM) — en partie au message cohérent venant des provinces, de l’industrie et d’Ottawa.
«Comme ils se sont tous concertés, les messages étaient les mêmes et il était beaucoup plus facile de procéder de cette façon», a-t-il déclaré mardi à l’Empire Club de Toronto.
«Il y a un très fort sentiment d’unité entre tous les premiers ministres à ce stade — à l’exception de l’Alberta.»
M. Verheul a invité les différents leaders du pays à essayer de convaincre le gouvernement de l’Alberta «d’adhérer également. Parce que le fait que l’Alberta ait pris une direction différente au cours des dernières semaines a considérablement affaibli la position du Canada.»
Pour l’instant, le Canada est en mode «contrôle des dégâts», a-t-il déclaré.
Le bureau de Mme Smith n’a pas encore répondu à une demande de commentaires.
Depuis que M. Verheul a fait ses remarques mardi, d’autres premiers ministres ont fait marche arrière sur la position fédérale concernant les tarifs douaniers.
Mercredi, le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, a déclaré «avoir un problème» avec l’imposition de tarifs sur les exportations d’énergie. Le même jour, le premier ministre du Québec, François Legault, a suggéré que ces mesures ne devraient se faire qu’avec le consentement des provinces.
Vendredi, le président Trump a de nouveau déclaré que le Canada devrait devenir un État américain, ajoutant que «c’est un peu fou» de suggérer que les États-Unis ont besoin des importations canadiennes.
M. Trump a déclaré avoir dit à M. Trudeau plus tôt que les États-Unis subventionnaient le Canada à hauteur de milliards de dollars, et a affirmé que le premier ministre Trudeau aurait dit que, si ces subventions cessaient, le Canada deviendrait «une nation en faillite».
Le président américain a insisté sur le fait que le Canada aurait «une meilleure couverture médicale» et «n’aurait pas à se soucier de l’armée» en tant qu’État américain, ajoutant que le Canada a été «très méchant avec nous sur le plan commercial».
Des experts ont déclaré que le déséquilibre commercial entre Canada et les États-Unis provenait en grande partie des exportations d’énergie du Canada. Ils disent également qu’il est faux de considérer cela comme une subvention — en particulier lorsque M. Trump propose des estimations très irrégulières de son ampleur.
Interrogé sur les propos de du président américain, le ministre de la Défense Bill Blair a déclaré que sa «rhétorique malheureuse» était offensante et que «le Canada ne sera jamais un État en faillite».
La candidate à la direction du Parti libéral Chrystia Freeland, qui a contribué à orienter les renégociations de l’ALENA, a assuré que le Canada ne deviendrait «absolument pas» un État en faillite si les tarifs douaniers menacés par M. Trump entraient en vigueur.
— Avec des informations de Kyle Duggan