Pierre Poilievre presse le Sénat «non élu» d’adopter un projet de loi conservateur
OTTAWA — Les conservateurs ont accentué la pression sur le Sénat, mardi, pour qu’il vote en faveur d’un projet de loi concernant la tarification sur le carbone, tout en accusant les libéraux de tenter d’intimider les sénateurs pour qu’ils retardent l’adoption du projet de loi.
Les libéraux, pour leur part, ont renvoyé les accusations contre les conservateurs, les accusant de «tactiques d’intimidation» en ciblant les sénateurs qui ne sont pas d’accord avec la position conservatrice.
Au Sénat, un amendement au projet de loi a été rejeté mardi soir, rapprochant ainsi le projet de loi d’initiative parlementaire de devenir loi.
Tous les regards sont tournés vers le débat sur le projet de loi, qui exempterait certains agriculteurs de la tarification sur le carbone. Le débat s’est enflammé au point où certaines sénatrices ont signalé des abus en ligne: l’une d’entre elles a quitté son domicile pendant une fin de semaine en raison d’une menace, tandis qu’un autre s’est excusé d’avoir eu un comportement intimidant devant le Sénat.
Mardi, le chef conservateur Pierre Poilievre a ajouté son grain de sel au débat en déposant une motion à la Chambre des communes dans laquelle il demandait aux députés de voter en faveur du fait de dire au «Sénat non élu» de se dépêcher et d’adopter le projet de loi C-234.
Le projet de loi, présenté l’année dernière par le député conservateur Ben Lobb, cesserait d’appliquer la taxe sur le carbone pour le gaz naturel et le propane utilisés pour les activités agricoles, et ce, pendant au moins huit ans.
L’essence et le diesel utilisés pour l’agriculture sont déjà exonérés, car les agriculteurs n’ont aucune autre option pour faire fonctionner leurs machines. Mais le gouvernement fait valoir qu’en ce qui concerne les combustibles utilisés pour chauffer les granges ou alimenter les séchoirs à grains, il existe d’autres moyens que les agriculteurs peuvent mettre en place.
Le projet de loi a été adopté par la Chambre des communes plus tôt cette année avec le soutien de tous les partis, à l’exception des libéraux.
M. Poilievre a soutenu que la Chambre des communes «démocratiquement élue» doit l’emporter, en particulier sur tout projet de loi traitant de ce qu’il appelle «les taxes».
«Seule la Chambre des communes a le pouvoir de gérer l’argent public», a-t-il insisté.
Les libéraux répliquent
Les conservateurs ont déjà accusé le ministre de l’Environnement, Steven Guilbeault, d’avoir appelé des sénateurs pour les «intimider» et les inciter à bloquer le projet de loi, une accusation que M. Guilbeault a niée.
Le ministre a expliqué qu’il s’était entretenu avec environ six sénateurs pour préciser la position du gouvernement, mais qu’il ne leur avait pas indiqué comment voter.
Ce sont les conservateurs, a répliqué M. Guilbeault, qui tapent du pied et exigent que le Sénat tienne compte de leurs demandes.
«Le Parti conservateur n’a pas estimé que le Sénat était si peu élu lorsqu’il a tenté de bloquer l’adoption du (projet de loi) C-69 sur l’évaluation d’impact en 2019», a fait valoir M. Guilbeault.
«Et c’est un peu ironique qu’ils nous disent de laisser le Sénat faire son travail, alors qu’ils essaient de faire adopter une motion qui ferait pression sur le Sénat pour qu’il fasse ce qu’il veut.»
M. Guilbeault a ensuite pointé du doigt le leader conservateur à la Chambre, Andrew Scheer, pour avoir publié «des photos en ligne de certaines sénatrices comme si elles étaient des criminelles recherchées».
«Qui intimide qui? a demandé M. Guilbeault. Nous ne disons pas aux sénateurs comment voter. Le Parti conservateur le fait.»
M. Guilbeault a également rappelé à la Chambre que le chef conservateur au Sénat, Don Plett, avait dû s’excuser la semaine dernière d’avoir traversé le parquet et d’avoir crié en direction de deux sénatrices en raison de leur position sur le projet de loi.
M. Poilievre a ignoré les accusations de M. Guilbeault contre M. Scheer, affirmant qu’il n’avait fait que partager des informations accessibles au public sur les deux sénatrices.
«Je veux lui dire à quoi ressemble l’intimidation», a-t-il poursuivi.
C’est lorsqu’une mère célibataire ne peut pas nourrir ses enfants ou payer ses factures à la fin du mois, a-t-il expliqué.
«Elle est là la véritable intimidation que ce gouvernement a imposée à la classe ouvrière, a-t-il ajouté. Il veut parler de menaces? C’est une menace pour la qualité de vie des gens qui travaillent dans ce pays.»
Le Sénat débat toujours de l’essentiel du projet de loi C-234 et d’autres amendements devraient être proposés. Aucune date n’a encore été fixée pour le vote final.