Transport en commun: un syndicat réclame un groupe de travail sur la sécurité

TORONTO — Dans les transports en commun, les attaques violentes ont atteint des «niveaux de crise», a déclaré mercredi le président d’un important syndicat canadien, alors qu’il appelait à la création d’un groupe de travail national sur la sécurité des transports en commun.

Le groupe de travail doit comprendre des agences de transport en commun de partout au pays et des représentants de tous les paliers de gouvernement, a affirmé John Di Nino, président national du Syndicat uni du transport.

«Ces attaques, non seulement à la (Commission de transport de Toronto), mais dans tout le pays, sont vraiment à un niveau de crise», a clamé M. Di Nino lors d’une entrevue mercredi.

«Nous assistons à des agressions d’opérateurs, à de la violence contre les travailleurs des transports en commun et maintenant contre nos usagers à un rythme alarmant dans tout le pays.»

Un groupe de travail devrait examiner si une formation à la désescalade, des peines plus sévères, un financement accru pour la santé mentale, de meilleurs soutiens au logement et une plus grande présence policière pourraient aider à prévenir la violence dans les transports en commun, a ajouté M. Di Nino.

L’appel à un groupe de travail intervient après un certain nombre d’attaques violentes visant des travailleurs et des usagers de la Commission de transport de Toronto (TTC).

Ces derniers jours, la police a rapporté qu’une femme a été poignardée dans un tramway, deux travailleurs en uniforme de la TTC ont été agressés alors qu’ils se rendaient au travail, un chauffeur de la TTC a été ciblé avec un pistolet à air comprimé et une personne portant un couvre-chef religieux a été frappée dans une station de métro. La police allègue que cette dernière agression serait un crime haineux. 

Mercredi, un adolescent a été poignardé dans un autobus dans l’ouest de la ville, selon la police de Toronto. La victime de 16 ans a été transportée à l’hôpital avec des blessures graves à la suite d’un coup de couteau, ont précisé les premiers répondants. Les forces de l’ordre recherchent un suspect dans la vingtaine. 

Dans un événement distinct le même jour, une personne a été arrêtée après avoir prétendument poursuivi deux travailleurs de la TTC avec une seringue. 

Le mois dernier, une femme a été poignardée à mort et une autre a été blessée lors d’une attaque au hasard dans une rame de métro de Toronto.

Les agences de transport en commun doivent être transparentes quant à l’étendue du problème de sécurité, a déclaré M. Di Nino, qui a appelé à un signalement transparent des incidents violents.

«Nous ne pouvons pas nous permettre de continuer à dire “nos pensées et nos prières” et “nos meilleurs vœux vont” et “c’est un cas unique”. Ce temps est passé, a martelé M. Di Nino. Nous devons avoir ces discussions maintenant.»

Collaboration nécessaire

Interrogé mardi sur la sécurité des transports en commun, le premier ministre Justin Trudeau a dit que le gouvernement fédéral continuerait de travailler avec les provinces et les villes pour assurer la sécurité des Canadiens.

«Si le gouvernement fédéral a un rôle à jouer, nous le ferons sans aucun doute, a-t-il avancé. C’est quelque chose sur lequel nous sommes heureux de collaborer avec les provinces et les municipalités.»

Dans un communiqué, le ministère des Transports de l’Ontario s’est dit profondément préoccupé par l’augmentation de la violence et ouvert à des discussions sur la façon d’assurer la sécurité des systèmes de transport en commun de l’Ontario.

«Les travailleurs du transport en commun jouent un rôle essentiel en veillant à ce que les Ontariens puissent se rendre là où ils doivent aller chaque jour, et eux, tout comme les travailleurs navetteurs, méritent de se sentir en sécurité», a déclaré l’attachée de presse de la ministre des Transports Caroline Mulroney, Dakota Brasier. 

«Tous les paliers de gouvernement s’entendent sur l’importance de s’assurer que les systèmes de transport en commun de la province sont sécuritaires.»

De son côté, la Commission de transport de Toronto s’est félicitée de l’appel à un groupe de travail national et à une «réflexion originale» pour lutter contre la violence dans les transports en commun, car elle ne peut pas résoudre le problème seule, a affirmé le porte-parole de la TTC, Stuart Green. 

«Nous voulons que tout le monde soit à la table parce que nous ne sommes pas équipés en tant qu’agence de transport en commun pour traiter des problèmes de santé mentale et de société, a-t-il déclaré. Notre cœur de métier est de livrer les bus, les tramways et les métros à temps. Il ne s’agit pas de fournir des services sociaux.»

Le chef de la direction de la TTC, Rick Leary, s’est entretenu avec des collègues de villes comme Philadelphie, New York et Boston pour obtenir des informations, a précisé M. Green. Les agences à travers l’Amérique du Nord font face à des situations où le transport en commun agit comme un abri contre le froid.

«Nous entendons dire que le transport en commun est devenu un lieu pour ce que nous qualifierions généralement de comportement antisocial, a ajouté M. Green. Les personnes ayant des problèmes de santé mentale et de toxicomanie qui n’obtiennent pas le soutien dont elles ont besoin ailleurs cherchent un refuge dans les systèmes de transport en commun.»

Le maire de Toronto, John Tory, devait rencontrer la TTC, la police et les dirigeants syndicaux plus tard cette semaine pour discuter de la sécurité des transports en commun, a précisé mardi son attaché de presse.

«Le maire a été clair: nous devons mettre fin à ces actes de violence et de manque de respect envers les travailleurs des transports en commun», a écrit Taylor Deasley dans un communiqué, lorsqu’il a été interrogé sur les récents appels lancés aux conservateurs pour apporter des changements à la sécurité des transports en commun.

Une problématique nationale

D’autres villes sont également confrontées à des problèmes de sécurité des transports en commun.

M. Di Nino a souligné des événements récents à Edmonton où des chauffeurs d’autobus ont été menacés par une arme à feu.

Dans cette ville, la police a signalé 35 incidents violents sur la propriété d’Edmonton Transit ainsi que neuf liés aux armes depuis le début de 2023.

La ville d’Edmonton a lancé un plan de sécurité du centre-ville et du système de transport en commun en mai en réponse à l’augmentation de la violence, de l’itinérance et de la consommation de drogue dans la région. Elle a mis en place de nouveaux règlements pour les passagers, des toilettes temporaires et une présence policière accrue. Quelque 860 000 $ ont également été investis dans la gestion contre les campements de sans-abri.

Par ailleurs, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a déclaré que cinq jeunes avaient été accusés d’avoir agressé sexuellement trois autres personnes dans un autobus de Halifax en octobre.

À Montréal, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) dénonçait l’an dernier une hausse marquée des agressions envers les travailleurs du métro, a rapporté «La Presse» en octobre.

La présence de sans-abri et de personnes vulnérables expliquait cette augmentation, selon le rapport de la CNESST cité. 

Mercredi, le porte-parole de la Société de transport de Montréal (STM), Philippe Déry, a affirmé dans un courriel que «la sécurité des employés et clients est une priorité absolue», sans pouvoir fournir de données sur les agressions subies dans le réseau immédiatement. 

«Des formations misant sur la désescalade sont offertes à nos employés en contact étroit avec le public pour contribuer à une résolution pacifique de situations potentiellement dangereuses et les employés sont outillés pour adapter leurs interventions au profil diversifié que peuvent présenter les personnes qui transitent dans nos installations et véhicules», a-t-il précisé. 

M. Déry a également indiqué que la présence de caméras dans les bus et le métro ont un effet dissuasif, car les enregistrements peuvent être utilisés lors d’enquêtes. 

Pour M. Di Nino, des mesures immédiates telles qu’une visibilité et une vigilance accrues de la part de la police et des agents chargés de l’application des tarifs pourraient faire une différence dans la réduction de la violence, mais un financement accru du transport en commun et des professionnels formés pour désamorcer les problèmes de santé mentale sont nécessaires comme solutions à long terme.

«Nous demandons à nos intervenants, le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial, les municipalités et toutes les agences de transport en commun de venir à la table… et de présenter des recommandations sérieuses et concrètes sur la façon dont nous pouvons rendre le système de transport en commun plus sûr dans chaque juridiction», a-t-il conclu.

«Nous devons agir maintenant.»

— Avec des informations d’Angela Amato et de Johanna Pellus.