Un ver résistant au traitement se propage parmi les chiens aux États-Unis

MONTRÉAL — Des mutations génétiques subies par un parasite qui s’accroche à la paroi intestinale des chiens avec son bec en forme de crochet lui permettent de résister à l’un des principaux médicaments utilisés pour le traiter, prévient une étude canadienne.

Des chercheurs de l’Université de Calgary ont trouvé cette forme résistante de l’ankylostome (le ver-crochet, ou hookworm en anglais) dans la moitié des échantillons d’excréments de chiens américains qu’ils ont analysés.

On ne sait pas avec exactitude si ce ver résistant se répand aussi au Canada, mais les chercheurs ont récemment obtenu le financement nécessaire pour poursuivre leurs travaux de ce côté-ci de la frontière.

Les auteurs de l’étude ont identifié dans le génome du parasite deux mutations qui lui permettent de résister au traitement, dont une qui n’avait jamais été documentée auparavant.

«Ce n’est pas vraiment surprenant, a commenté le docteur Christopher Fernandez-Prada, un spécialiste des parasites à la faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal. Depuis quelques années, et surtout aux États-Unis, on utilise de façon très intense le produit de prévention. La résistance n’est pas un phénomène unique aux bactéries (donc) on s’y attendait depuis longtemps.»

Comme le ver est très présent dans l’environnement, poursuit-il, il est relativement facile pour un chien de s’infecter avec un parasite qui a survécu après avoir été exposé à ces molécules.

La maladie se transmet par le biais de larves qui se cachent dans le sol après avoir été expulsées dans des excréments infectés. La larve perce la peau de son hôte pour relancer le cycle de vie. L’ankylostome peut aussi infecter les humains et causer des lésions cutanées.

L’ankylostome a longtemps été confiné aux régions plus chaudes, comme le sud des États-Unis. Sa propagation au Canada pourrait toutefois être facilitée par le fait que le Canada importe de grandes quantités de chiens des États-Unis, a rappelé le docteur Fernandez-Prada.

Après des catastrophes comme l’ouragan Katrina, précise-t-il, «le Canada est toujours preneur» pour des animaux qui cherchent un nouveau toit.

On constate aussi que le parasite a commencé à migrer vers le Nord, possiblement sous l’effet du réchauffement climatique. Une carte publiée par les chercheurs canadiens montre d’ailleurs que des échantillons infectés ont été trouvés, et parfois en grandes quantités, dans l’État de New York, au Vermont, au New Hampshire et dans le Maine ― toutes des régions limitrophes du Québec et du Canada atlantique.

Les touristes qui prendront dans quelques semaines le chemin des États-Unis avec leur compagnon à quatre pattes sont donc invités à consulter leur vétérinaire avant de partir et à ensuite faire preuve de jugement.

«On essaie d’éduquer les propriétaires pour qu’ils changent leurs comportements et celui de leurs animaux, pour éviter de se rendre dans des endroits où le risque est un peu plus grand», a dit le docteur Fernandez-Prada, qui fait beaucoup de formation auprès des vétérinaires de la province.

Les terrains sablonneux, comme les plages, sont particulièrement propices à la propagation du parasite s’ils ont été fréquentés par des chiens porteurs du ver résistant qui n’avaient pas été correctement vermifugés, poursuit-il.

La concentration de parasites, pour des raisons évidentes, pourra aussi être un peu plus élevée dans les parcs à chiens.

«Il faut un endroit où il y a une forte concentration de matières fécales provenant d’autres chiens, a souligné le docteur Fernandez-Prada. On ne peut pas éliminer entièrement le risque, mais il ne faut pas paniquer non plus.»

La nouvelle étude, précise-t-il en terminant, ne démontre pas que l’ankylostome est maintenant entièrement résistant à tous les traitements, mais plutôt que la résistance est plus répandue qu’on ne le croyait.

Les vétérinaires ont toujours à leur disposition des médicaments efficaces pour le combattre, a assuré le docteur Fernandez-Prada. «On a un problème qui émerge, mais on a encore des outils et des solutions», a-t-il dit.

Les conclusions de cette étude ont été publiées par le journal médical PLoS Pathogens.